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grands génies n’ayant mis les ornemens que dans les lieux propres à les recevoir, ne s’estant servi de cette délicatesse que pour faire paraître leurs ouvrages plus grands et magnifiques. « Taine, avec plus de concision, exprimait une pensée analogue lorsqu’il disait : « Tandis qu’avec de petits moyens l’antique fait de grands effets, le moderne fait de petits effets avec de grands moyens. »

Ce fut en avril 1666 qu’Errard partit pour Rome, accompagné de plusieurs jeunes gens, — Du Vivier, architecte, Bonnemaire et Corneille, peintres, Nicolas Rahon, Lespingola et Clérion, sculpteurs, — qui furent les premiers pensionnaires de l’Académie. D’autres devaient bientôt les rejoindre ou les remplacer. Avant leur départ, Colbert avait arrêté, suivant les pouvoirs « à lui donnés par Sa Majesté, » les « statuts et règlement de l’Académie de peinture, sculpture et architecture, que le Roi avait résolu d’établir dans la ville de Rome. »

Cette Académie devait être composée de douze jeunes hommes « françois, de religion catholique, apostolique et romaine, sçavoir six peintres, quatre sculpteurs et deux architectes, sous la direction d’un peintre du Roy, qui sera establi recteur de ladite Académie, auquel ils seront obligez d’obéir avec toute sorte de soumissions et de respects. »

Pour quelque raison que ce fût, ce chiffre de douze pensionnaires ne pourrait être augmenté, mais, disait l’article 6 des statuts, « lorsqu’il viendra à vacquer quelque place, le surintendant des Bastimens, Arts et Manufactures de France, à qui il appartient d’y pourvoir, en sera averti par le peintre de Sa Majesté ayant la direction de ladite Académie et sera très humblement supplié de préférer ceux qui auront remporté les prix de l’Académie, en conformité de ses statuts. »

Les autres clauses, d’accord avec les idées et les usages du temps, édictaient des prescriptions très minutieuses concernant la discipline intérieure de l’Académie, les mœurs, les pratiques religieuses, les cours que les élèves auraient à suivre, et au nombre desquels il y en avait un d’anatomie et un autre de mathématiques.

L’article suivant mérite une mention particulière, car il précise nettement le but de l’Académie de France dont il ne cessa de rester une des règles essentielles : « Sa Majesté défend absolument à tous ceux qui auront l’honneur d’être entretenus dans ladite Académie de travailler pour qui que ce soit que pour Sa