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REVUE DRAMATIQUE


Comédie-Française : le Dédale, pièce en cinq actes, par M. Paul Hervieu. — Théâtre Sarah-Bernhardt : la Sorcière, pièce en cinq actes, par M. Victorien Sardou.


Le Dédale est-il une pièce à thèse ? Cette question ne manquera pas de paraître ingénue à la plupart des spectateurs qui ont vu la nouvelle pièce de M. Hervieu, et des critiques qui en ont rendu compte, puisque les uns et les autres ont à l’envi discuté la thèse de l’auteur et les moyens par lesquels il l’a défendue. Ces discussions à perte d’haleine sont pour une œuvre de théâtre ce qu’il y a de plus honorable ; cette fois encore, elles sont pour l’écrivain la meilleure récompense de la probité de son art, de son consciencieux et laborieux effort : elles valent mieux cent fois que certaines unanimités dans l’acquiescement ; et c’est pourquoi il est juste d’y prêter l’oreille. Généralement, donc, on a trouvé piquant que l’auteur des Tenailles et de la Loi de l’Homme, devenu celui du Dédale, y présentât une thèse en contradiction avec celles dont il s’était fait jusqu’alors l’avocat attitré. Il avait jusqu’ici appelé de tous ses vœux, réclamé de toute son âpreté un élargissement du divorce qui tendait à faire du mariage quelque chose d’assez analogue à l’union libre. Mais à force de creuser un problème toujours le même, il aurait retrouvé les assises solides sur lesquelles se fonde la doctrine du mariage indissoluble. On a célébré la grande conversion de M. Hervieu. Plusieurs s’en sont réjouis, non sans faire des réserves sur la nature de certains argumens et sur la valeur des moyens scéniques employés par l’auteur… Je crains que se placer à ce point de vue ne soit le bon moyen pour ne pas comprendre la conception dramatique très particulière qui est celle de M. Hervieu.

Apparemment, celui-ci ne songe guère à réclamer qu’on raye de nos lois le divorce, et on aurait tort de voir dans le Dédale un