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2° En raison de la grande fatigue éprouvée par la plupart des troupes dont était composé le petit corps français que le général était parvenu à amener sous les murs de Pékin[1], il était indispensable, — au cas même où, contrairement aux conventions arrêtées, une action immédiate se trouverait nécessitée par une circonstance imprévue, — d’accorder à ces troupes quelques heures de repos avant de les faire entrer en ligne, afin de ne pas être conduit à exiger de leur part un nouvel effort, peut-être considérable, et qui n’eût, pu être alors accompli que dans de très mauvaises conditions.

3° Le général Frey avait la conviction, que si, comme rien ne le faisait prévoir, et ce qui n’eut pas lieu, en réalité, — les combats livrés par les Russes et par les Japonais pouvant être considérés comme des engagemens d’avant-gardes ou de fortes reconnaissances, — une action générale sérieuse venait à se dérouler sous les murs de la capitale chinoise, les contingens aux prises avec l’ennemi ne manqueraient point de faire appel au concours des trois belles batteries d’artillerie et de la petite poignée de troupes d’élite qui composaient le petit corps français.

4° En vue d’une pareille éventualité, le choix du village du premier barrage, comme position d’attente ou comme position de réserve générale, à cheval sur un canal, infranchissable en toute autre partie qu’à ces barrages, et qui divisait en deux groupes les forces alliées réparties au nord et au sud de ce canal, permettait au corps français de manœuvrer, le cas échéant, sur l’une ou sur l’autre rive et de se porter rapidement sur tous les points où son intervention pouvait devenir nécessaire.

D’autre part, dès que le général Frey eut connaissance des événemens de la matinée, il eut pour principale préoccupation de faire en sorte que le corps français fût représenté au nombre des troupes qui, ce même jour, allaient effectuer leur entrée dans Pékin. L’attente de deux longues heures, indépendante de sa volonté, qu’il dut faire dans le camp japonais, près de la porte de Tchi-Koua-Men, fut cause que les troupes françaises ne pénétrèrent pas dans Pékin en même temps que les premiers détachemens russes et japonais ; mais encore en cette circonstance, l’amour-propre national put être sauvegardé, car le général et un petit corps français, composé d’infanterie et d’artillerie,

  1. Des fractions arrivées, à Tien-Tsin, à marches forcées, la veille, à neuf heures du soir à Tong-Tchéou, avaient dû se remettre en route à minuit.