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recherches faites par le général Frey à Saigon, puis à son passage à Shang-haï et à Nagasaki, pour se procurer des documens de cette nature, ne donnait aucune indication sur la topographie de la contrée. Le général envoya M. d’Anthouard et un officier d’état-major pour explorer les environs et pour rechercher l’emplacement de l’écluse du canal la plus voisine. Sur l’affirmation donnée par M. d’Anthouard et par un guide, qu’une écluse, ou plutôt un barrage, pouvant livrer passage à une charrette chinoise, se trouvait à deux kilomètres environ, en avant de la colonne, et à 2 500 mètres environ de la porte de Toung-Pien-Men, le général envoya une petite section d’infanterie, sous les ordres d’un officier d’état-major, pour reconnaître ce barrage et savoir s’il était occupé par l’ennemi. Sur ces entrefaites, un officier américain vint dire au général, de la part du général Chaffee, commandant le corps de cette Puissance, qu’il avait dû se tromper de direction ; qu’aucune troupe alliée ne se trouvait en avant, et qu’il était, par suite, en l’air, bien exposé, vu le faible effectif de sa colonne.

Le général Frey mit en quelques mots cet officier au courant de son projet et l’invita à aller en faire part à son général. À ce moment, vers six heures du matin, un peloton de cavaliers du Bengale, puis un peloton de cavalerie américaine, dépassèrent la colonne et se portèrent en avant, en fouillant le terrain.

Vers six heures quinze, les deux premiers groupes de marche du corps français étaient réunis ; le troisième groupe, comprenant l’artillerie de campagne, retardé dans sa marche par des difficultés de diverses sortes qu’il avait rencontrées, suivait à 1 500 mètres environ de distance. Le général, suffisamment éclairé sur son front, remit la colonne en route, lentement, pour la rapprocher du barrage.

Le pays, plat et uni, depuis Tong-Tchéou, change un peu d’aspect à partir de cet endroit. On y rencontre quelques ondulations, quelques plis de terrain ; mais la vue reste toujours très bornée, en raison des vergers qui se multiplient à mesure que l’on approche de Pékin, et des maïs, sorghos et autres cultures qui, en pleine maturité, à cette époque de l’année, atteignent plusieurs mètres de hauteur. Aussi, du sommet des arbres sur lesquels grimpent quelques officiers pour interroger l’horizon, n’aperçoit-on de tous côtés que des fourrés inextricables de verdure. Au loin, dans l’est, par intervalles, apparaissent quelques