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et cette belle unité de l’art chrétien, alors étroitement lié au culte, et qui, par cela même, proscrivait toute inspiration individuelle. L’art de l’école byzantine, école toute de transition entre l’art antique, qui poursuivait le beau pour la forme elle-même, et l’art chrétien, qui ne se servait de la forme que pour l’expression de l’idée, s’y manifeste dans toute la plénitude de son développement.

Avec l’Histoire de l’Art dans l’antiquité[1], qui restera un des monumens les plus complets de ce temps-ci, nous remontons aux sources mêmes de l’art. Le huitième volume de cet ouvrage considérable qui fait honneur à l’érudition française est consacré à la Grèce archaïque[2]. La tâche de nous décrire cette terre antique, ce pays classique du beau ne pouvait être confiée à un archéologue plus érudit, à un écrivain plus compétent que M. Georges Perrot. En dépit de quelques réminiscences et imitations, il met en lumière l’originalité de la sculpture grecque. Il montre comment les écoles dorienne et attique, par la succession de leurs travaux, ont concouru à préparer les chefs-d’œuvre prochains, et que ce qui rend toutes ces sculptures si attachantes, malgré leurs incorrections mêmes, ce sont les différences qui les distinguent les unes des autres, leur sincérité et leur diversité. Et c’est ainsi qu’il nous conduit à l’époque où nous allons aborder l’œuvre du siècle fécond et glorieux dans l’Athènes de Périclès. Les artistes et les savans les plus autorisés et les plus éminens ont apporté leur contribution à ce travail de reconstitution.

Tous les arts dont l’action profonde ou superficielle peut être reconnue dans l’art occidental du moyen âge : art musulman et art byzantin, art germanique et art français, avant même ou après la conquête des princes d’Orient et d’Occident, ont pénétré dans l’Italie méridionale. A la suite du byzantin, l’art romain du VIIIe et du IXe siècle a été en quelque sorte le véhicule de l’art chrétien, la source de l’art bénédictin et de l’art carolingien. Parfois les formes étrangères y ont gardé leur accent d’origine, là où elles ont été transportées. Ainsi rien ne distingue les fresques basiliennes d’Apulie de celles qui ont été peintes en Grèce ; l’église du Saint-Sépulcre, à Barletta, est une église française de l’Orient latin ; l’église d’Arbona dans les Abruzzes est une église cistercienne de Bourgogne : mais, plus souvent, les artistes locaux ont uni l’art d’Occident et l’art d’Orient dans leurs combinaisons. Aucune église de Campanie n’atteint à la richesse bigarrée de ces basiliques palatines de Sicile, dont l’architecture, moitié grecque, moitié

  1. Hachette.
  2. Hachette.