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son oncle, le roi Humbert, tomba sous les coups d’un assassin, Ce fut le capitaine Bade qui fut chargé par le gouvernement Italien d’aller à la recherche du prince pour lui porter la tragique nouvelle : il le rencontra à la terre François-Joseph et le ramena en Europe. Quant à ses expéditions au Spitzberg, il ne les compte plus : il en était au moins à sa trentième, me disait-il, sans pouvoir répondre avec précision à ma question.


I

Le 3 août, par une radieuse matinée, l’Oihonna démarra, et, au bout de quelques tours d’hélice, nous eûmes perdu de vue la riante ville de Kiel. Ce port du Holstein, qui n’était qu’un village au temps où il appartenait au Danemark, a pris un splendide essor depuis son annexion à l’empire allemand. Le canal Kaiser Wilhelm, inauguré en 1893, le met en communication directe avec la mer du Nord. De l’autre côté de la baie s’élèvent les fameux chantiers Horvaldt, qui viennent de lancer leur millième navire. Cette baie de Kiel, bordée de vertes collines boisées, sillonnée d’une multitude d’embarcations, offre un admirable coup d’œil : longue de 18 kilomètres, et partout d’une grande profondeur, c’est peut-être le plus beau port naturel de l’Europe. C’est là que stationne l’escadre de la Baltique, dont nous passons en revue les gros cuirassés qui reposent à l’ancre et s’espacent, le long de la rade, sur une étendue d’une demi-lieue. Le géant de la flotte est le Kaiser Friedrich III : cette citadelle flottante, armée de 54 pièces de canon, n’a pas coûté moins de 22 millions de marks. Le Hohenzollern est là aussi, battant le pavillon impérial pour marquer la présence à bord de l’Empereur, de retour de sa dernière croisière en Norvège. Autour des navires de guerre se glissent des canots montés par des marins en costume blanc, qui nous saluent au passage en levant leurs rames en l’air, au commandement militaire.

Notre navigation en mer débute par le délicieux voyage au milieu des îles danoises. Le temps est superbe, la mer calme comme un lac, et c’est en léger vêtement qu’on se livre aux charmes de la promenade sur le pont. Sur 45 passagers, parmi lesquels on compte 8 dames, il y a 37 Allemands, 2 Croates, 2 Italiens, un Russe, un Polonais, un Suisse et un Belge. La science est représentée par un fort contingent de professeurs,