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La grande pensée, la grande affaire, l’Affaire du ministère Combes, l’expulsion des congrégations elle-même, n’échappe pas à la hantise électorale ; la loi impitoyable mollit à l’occasion, et « la triple cuirasse » que M. Combes a revêtue « pour se garder de sa propre faiblesse » n’est pas impénétrable, n’est pas hermétiquement close à toute acception ou exception de personnes. Le temps viendra bientôt, s’il n’est déjà venu, où il fera bon être « congréganiste de M. X., » de la Gauche radicale, ou de M. Z., socialiste parlementaire et encore plus ministériel, comme autrefois c’était une sûreté que d’être juif du Roi en France ou juif du Pape dans Avignon. La députation des Hautes-Pyrénées, y compris le député d’Argelès, M. Achille Fould, est une des molécules granitiques du Bloc : aussi la basilique de Lourdes a-t-elle été sauvée : et l’on n’a pas touché aux chapelles du canton de Saint-Hippolyte-du-Fort, selon la parole solennelle qu’en donna M. le sénateur Borne. On avait fermé une école à M. de La Batut : il s’est fâché, on la lui a rouverte. Nous ne saurons jamais ce qu’ont pu obtenir de « la faiblesse » de M. Combes, malgré la triple cuirasse dont il la protège, tant de soutiens du cabinet, « partisans résolus de l’application énergique de la loi contre les congrégations dans toute la France, » excepté… dans leur circonscription. Et où donc ai-je lu que M. le président du Conseil des ministres, en sa qualité de président du Conseil général de la Charente-Inférieure, avait fait ou laissé voter une subvention à un hôpital tenu par des sœurs ?

La République est-elle trahie ; ou simplement M. Combes se comporte-t-il envers « ses » religieuses comme envers « ses » bouilleurs de cru ? Dans le discours de Saintes, en effet, devant « l’élite charentaise du parti républicain, » au milieu d’ « apôtres » charentais des idées républicaines, auxquels il rend le témoignage qu’ils sont, comme lui, « mus par des considérations générales d’intérêt départemental, » M. Combes arrange bien « la funeste loi des boissons » et la non moins funeste réglementation du privilège des bouilleurs de cru. Ce qui revient à dire que M. Combes, président du Conseil général de la Charente-Inférieure, traite du haut en bas M. Combes président du Conseil des ministres, si c’est le cabinet de M. Combes, président du Conseil des ministres, qui a présenté et soutenu avec acharnement le projet que blâme avec acrimonie M. Combes, président du Conseil général de la Charente-Inférieure. Du moins est-il resté