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Genlis, rend hommage à leur amitié fraternelle, à la douceur et à la bienveillance de leur commerce.

Plus tard, le biographe de Louis David trouvera dans les papiers du peintre des notes qui lui permettront de nous apprendre que la comtesse de Bellegarde « était une brune extrêmement jolie, mise avec l’élégance et la liberté de costume de ce temps. Elle profitait de sa jeunesse et de sa réputation de femme à la mode pour vivre et s’exprimer comme bon lui semblait. » Au même narrateur nous devons de savoir que les deux sœurs fréquentaient l’atelier de David, où les avait conduites une Noailles, leur amie, ce sur quoi nous pouvons remarquer qu’elles connaissaient déjà l’ancien conventionnel : il était des familiers du château d’Epone du vivant de Hérault de Séchelles, et elles s’y étaient rencontrées avec lui.

À ces détails trop brefs et trop rares, Aimée de Coigny en ajoute un autre : « La vicomtesse de Laval, je ne sais ni pourquoi ni comment, vint à connaître Mesdames de Bellegarde et elle en fit aussitôt ses esclaves, ce qui n’étonnera aucun de ceux qui la connaissent. Maîtresse de M. de Talleyrand quand elle était jolie, actuellement son amie devenue très exigeante, la seule au fond qui ait de l’empire sur lui, » elle poussa ces dames à organiser chez elles un dîner hebdomadaire qui réunissait des artistes et des hommes de lettres : Lemercier, Alexandre Duval, le peintre Gérard, Talleyrand lui-même. Ces réunions se prolongèrent quatre ou cinq ans.

A cela se réduisent les informations que nous livrent sur les dames de Bellegarde leurs contemporains. On reconnaîtra que c’est bien peu, alors que ce qu’ils en disent donne à penser qu’elles ont été répandues dans la société du Directoire et du Consulat, et que, dans leur salon ou dans ceux qu’elles fréquentaient, chez la princesse de Vaudémont ou ailleurs, elles ont reçu les hommages des hommes marquans de leur temps : Saint-Aignan, Pasquier, Molé, Lavalette, Montliveau, Dalberg, Vitrolles et combien d’autres. En ces années qu’on croit si bien connaître, elles ne nous apparaissent qu’enveloppées d’obscurités, à ce point enveloppées que le grave cardinal Billiet, convaincu qu’il dit la vérité, forgera plus tard tout un roman inspiré par des informations mensongères.

A l’en croire, Adèle de Bellegarde, dont il a ignoré l’arrestation après la mort de Hérault de Séchelles, a eu un fils de son