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de première classe, 2 sloops, 4 destructeurs (destroyers), 3 torpilleurs et 6 sous-marins. Un très grand nombre de bâtimens de ces divers types sont encore en construction, et on s’attend à ce qu’avant le 1er avril 1904, 6 vaisseaux de ligne, 11 croiseurs cuirassés, 1 croiseur de seconde classe, 2 sloops, 4 destructeurs, 8 torpilleurs, 3 sous-marins soient livrés à l’amirauté. Un quatrième port militaire va être créé, sur la côte orientale du Royaume-Uni, au Firth of Forth, près d’Edimbourg. Le budget de la guerre, à quelques millions près, égale celui de la marine, et s’élève à 862 millions. Les deux réunis forment un total de 1 732 millions de francs.

Sous l’influence de ces énormes besoins, un double courant se manifeste en Angleterre : d’une part, les libéraux de l’ancienne école, ceux que l’on pourrait appeler les gladstoniens, ceux dont les dernières élections partielles font prévoir le retour aux affaires dans un avenir plus ou moins lointain, veulent réduire les dépenses. D’autres envisagent résolument le maintien des budgets de guerre et songent même à y ajouter des charges nouvelles, notamment pour l’instruction populaire et la construction de logemens ouvriers : ceux-ci prétendent remanier le budget des recettes en y inscrivant des droits protecteurs ; ils ne visent à rien moins qu’à un renversement complet de la politique économique dont la Grande-Bretagne s’enorgueillit depuis plus d’un demi-siècle ; ils parlent, comme sur le continent, de l’agriculture sacrifiée à l’industrie ; ils réclament un pacte colonial, par lequel ils prétendent cimenter l’union des colonies avec la mère patrie. M. Chamberlain mène ce mouvement.

Quoi qu’il en soit, le pays est arrivé à la limite des impôts qu’il peut payer ; il marque son mécontentement de la direction suivie, dont il est pourtant le premier responsable. Il voit le fruit d’une sagesse demi-séculaire perdu en trois ans ; sa rente, précipitée de plus de vingt points, est le témoignage irrécusable de cette décadence économique, tant il est vrai que les nations les plus fortes ne peuvent pas impunément s’écarter des règles fondamentales d’une bonne gestion financière, dont une politique mauvaise est le mortel ennemi.

« Extravagance nationale ! » tel est le titre sous lequel le Statist <[1] de Londres juge la situation : « Nos recettes n’augmentent

  1. 4 avril 1903.