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semaines de 1760. À ce moment, le maréchal de Contades, après avoir remis son commandement d’Allemagne au duc de Broglie nommé maréchal de France, avait obéi aux ordres qui le rappelaient, sans que ce rappel eût revêtu cependant le caractère d’une disgrâce. Un grand poste lui était promis. Dans un repos nécessité par ses longues fatigues, il attendait un gage positif de la confiance que le roi et Mme de Pompadour ne cessaient de lui témoigner. Tout porte donc à croire qu’il était à Paris lorsque Mme Hérault de Séchelles accoucha et qu’à cette époque, s’éveilla la sollicitude paternelle dont on le vit bientôt entourer le nouveau-né.

Celle qu’on le vit aussi, à la même date, prodiguer à la mère, sa cousine par alliance, avait-elle une origine plus ancienne ? Datait-elle du temps où, à Saint-Malo, il s’était rencontré avec Mlle Magon de la Lande encore enfant ? N’était-elle au contraire que la conséquence naturelle de l’intérêt qu’il avait porté au colonel de Séchelles et qu’après la mort de celui-ci, il entendait continuer à sa veuve ? Tout à cet égard demeure doute et mystère, et, encore que la question eût mérité d’être éclaircie, ne fût-ce que pour établir quelles influences ataviques se sont exercées sur le dernier des Séchelles, on en est réduit à se contenter de ce que nous a légué sur ce point une tradition familiale ininterrompue jusqu’à nos jours et que n’ont jamais mise en doute ceux qui étaient le mieux placés pour en contester ou en affirmer la vérité. Si cette tradition est fondée, la sollicitude du maréchal pour la mère et pour l’enfant s’explique mieux. Elle aurait tenu au droit qu’il avait de se croire le père de l’héritier des Hérault.

On ne saurait méconnaître ce qu’une telle supposition présente d’invraisemblable, alors qu’à l’époque où commence à s’exercer la sollicitude qu’elle prétend expliquer, le maréchal avait cinquante-six ans et Mme de Séchelles dix-sept. Elle ne vaudrait même pas de fixer plus longtemps l’attention, si certains faits probans ne venaient la corroborer, et notamment celui-ci, c’est qu’à dater de la naissance de Jean Hérault, sa mère devenue veuve et le maréchal, qui vivait quasi séparé de sa femme, ont associé leurs vies aussi étroitement que le permettaient les convenances. Quand ils sont à Paris, ils se voient tous les jours. Lorsque le maréchal réside dans ses terres de Montjouffroy, Mme Hérault et l’enfant sont auprès de lui. Ils ont là leur appartement à