Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 17.djvu/87

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à diminuer le fardeau qui pesait sur le contribuable[1], soit en rachetant au moyen d’excédens budgétaires des rentes qui étaient aussitôt annulées, soit en transformant des rentes perpétuelles en annuités terminables, soit en permettant aux propriétaires de s’affranchir de certains impôts moyennant remise au Trésor de titres de rentes. Le résultat de ces efforts était double : il allégeait la somme annuelle du service de la dette et, en raréfiant les titres de celle-ci, il en faisait monter le cours : le niveau du crédit britannique s’élevait sans cesse ; à la veille du XXe siècle, le 2 3/4 atteignit le cours de 115 pour 100. Or, pour la première fois depuis vingt-cinq ans, les consolidés anglais viennent de tomber au-dessous de 90. Il est vrai que le revenu, qui en était de 2 3/4 depuis 1888, est ramené à 2 1/2 depuis le 1er avril 1903. Mais cette baisse n’en est pas moins frappante. En octobre 1899, au moment de la déclaration de guerre du Transvaal, les consolidés étaient encore cotés 103 ; depuis lors, nous avons assisté à une baisse progressive, interrompue par quelques reprises, comme celle qui se produisit au printemps de 1902, lors de la conclusion de la paix dans l’Afrique du Sud. Cette baisse est d’autant plus significative que le marché de Londres ne paraît point encore de force à l’enrayer et que la masse de titres flottans indique que les capitalistes, en dépit de l’attrait que cette chute profonde semblerait devoir exercer sur eux, ne se hâtent point de venir acheter le fonds national à un taux inconnu depuis longtemps.

Ce n’est pas seulement le gouvernement anglais qui, par ses emprunts répétés, pèse sur le marché. Les municipalités, en particulier celle de Londres, font des appels réitérés à l’épargne et contribuent dans une large mesure à l’abaissement du niveau du crédit public anglais. On a calculé que, d’ici au milieu de l’année 1904, le Conseil de comté de la capitale empruntera 460 millions de francs. Le socialisme municipal qui sévit en Angleterre impose aux villes des charges croissantes pour assurer l’exécution de services jusque-là confiés à des compagnies particulières. Le fonds des emprunts locaux (Local loans stock), créé par Goschen pour subvenir en partie aux besoins des autorités provinciales et communales, est aussi en augmentation constante et a donné lieu à la création de titres pour plus de 1 400 millions

  1. Voyez notre article sur la Dette anglaise, dans la Revue du 15 septembre 1898.