reste, en sollicitant les indigènes au travail par la convoitise, — en ne leur cédant jamais rien qui leur soit utile ou agréable sans qu’ils aient dépensé eux-mêmes quelque effort pour l’obtenir ; en renonçant par conséquent au système des cadeaux, trop longtemps pratiqué par des concurrences imprévoyantes, et qui fausse les idées du noir sur ses rapports avec les Européens. Ils devront proscrire absolument la vente aux noirs des armes et des alcools. En un mot, nous sommes partisans du travail, non certes imposé par la force, mais, comme à des enfans, nous le répétons, suggéré par l’ascendant d’une volonté supérieure et persévérante qui doit inspirer à la fois nos administrateurs et nos commerçans ou colons. À ce prix seulement nos noirs congolais, se groupant autour des blancs, travaillant sous leur direction, se hausseront petit à petit à la dignité d’hommes ; une sorte de domestication, de dressage, voilà ce que nous souhaitons de mieux aujourd’hui, à la fois pour eux et pour nous.
La main-d’œuvre assurée, en même temps que l’éducation progressive des indigènes, les concessionnaires pourront s’occuper de colonisation proprement dite ; rapprochant de tous côtés leurs factoreries, marchés et bientôt centres agricoles, ils opéreront pratiquement la jonction du versant congolais et de la côte gabonaise ; ils entreront en relations pacifiques avec les soupçonneux Pahouins, dont il semble que le nombre dépasse plusieurs millions, et qui sont parmi les plus intelligens des noirs congolais ; en encourageant ces reconnaissances, en en publiant et coordonnant les résultats, le gouvernement pourra se prononcer enfin sur le tracé d’un chemin de fer du Congo français : deux trajets sont proposés, l’un plus méridional, du Gabon à l’Alima, par l’Ogooué, c’est-à-dire à peu près le long de la route jadis suivie par Brazza ; l’autre, plus septentrional, à travers le pays parcouru par M. Fourneau, de Libreville à Sanga (Ouasso). Il nous semble que le premier tracé, desservant des régions déjà mieux connues et certainement riches, arrivant directement au Congo navigable en un point où pourrait converger toute la navigation d’amont, aurait plus de chances que l’autre de « payer » rapidement. Mais, quelle que soit la direction adoptée, quelle que soit la combinaison financière, il paraît indispensable que cette voie française soit établie au plus tôt ; les dispositions des directeurs du chemin de fer belge nous sont aujourd’hui favorables, mais les hommes et les circonstances peuvent changer