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l’appui du roi Léopold II et, sous le couvert de l’Association internationale africaine, il avait déjà commencé l’établissement de la route de portage destinée à relier, au travers des Monts de Cristal, l’estuaire maritime du Congo et le magnifique réseau navigable d’amont qui commence au lac désormais appelé Stanley-Pool. Brazza fit diligence : laissant Ballay en France, pour surveiller la construction des chaloupes démontables à lancer sur le Congo, il part, avec une nouvelle mission, dès le mois de décembre 1879 ; il remonte l’Ogooué, fonde en passant Franceville sur un confluent qu’entourent des forêts riches en caoutchouc, et descend vers le Congo par le pays des Batékés ; il remarque combien le versant congolais est mieux cultivé, d’aspect moins sauvage que celui de l’Ogooué ; il traite, au milieu de grandes fêtes, avec le roi du pays, Makoko, puis avec des chefs Apfourous, qui avaient fort peur des blancs depuis le passage en tempête de Stanley (septembre 1880) ; le 1er octobre 1880, l’expédition atteignait la rive septentrionale du Stanley-Pool, c’est-à-dire le Congo navigable, en amont des dernières cataractes, et Brazza établissait à Ntamo le petit poste qui a depuis reçu son nom, Brazzaville ; descendant alors la vallée du Congo, profondément encaissée dans les Monts de Cristal, il rencontrait bientôt Stanley, occupé à forer sa route, et qui put constater ainsi comment il avait été devancé ; le 15 décembre, Brazza était rentré à Libreville. Cette belle expédition a décidé, pour longtemps, du sort de notre ancienne colonie du Gabon : elle n’a plus été qu’un passage vers le Congo. On ne saurait non plus ne pas insister sur le caractère tout pacifique de cette exploration française ; dans ses palabres avec les chefs Apfourous, Brazza avait solennellement procédé au rite d’ « enterrement de la guerre. »

Dès lors, la partie est engagée entre Brazza et Stanley : en 1881-82, Brazza explora une route nouvelle entre la côte et le Congo navigable, celle de la vallée du Niari-Kouilou, plus méridionale que celle de l’Ogooué ; en janvier 1883, il reçut une troisième mission du gouvernement français, cependant que Stanley, sa route terminée, fondait Léopoldville sur la rive gauche du Pool (novembre 1881-février 1882) et mettait à l’eau, en amont, la chaloupe à vapeur En avant, amenée pièce à pièce au travers des Monts de Cristal. Mais le roi Makoko avait très strictement tenu toutes les promesses faites à Brazza, ne voulant pas traiter avec d’autres blancs, et le sergent sénégalais Malamine, laissé par