argent, de maintenir et d’exploiter paisiblement leur conquête[1] !
Mais l’on peut se demander si les puissances ont le droit de contester à la Chine la liberté de donner, dans ses conseils et dans l’œuvre de réorganisation de ses finances et de ses forces militaires, une action prépondérante, sinon exclusive, à telle ou telle d’entre elles ?
Il nous paraît conforme au simple droit des nations que la Chine puisse disposer de la faculté de prendre ses inspirations, ses conseils et ses moyens d’instruction militaire, en un mot, de puiser, en vue de sa rénovation, les élémens de ses réformes à la source qui lui semble le mieux convenir à ses goûts, à ses desseins et à ses intérêts, sous la condition, bien entendu, de l’observation stricte des clauses des traités qu’elle a pu conclure, avant cet état de choses, avec les autres puissances, et des autres obligations qu’elle a pu contracter envers elles.
On objecte bien que le protectorat de la Chine par une ou deux puissances, à l’exclusion des autres, constituerait un grave danger pour la paix du monde. Mais la Chine n’entend sans doute point se placer sous un protectorat ! Comme on l’a dit, elle n’est ni un infirme, ni un invalide qui ait besoin d’être conduit par la main, ni non plus un enfant à qui il faille donner un conseil judiciaire. Elle pourra, le moment venu, quand elle aura conscience et qu’elle aura donné la conscience de sa force, rechercher l’alliance qui répondra le mieux à ses intérêts, ce qui est une tout autre chose, et ce qui, au contraire, pourra constituer pour tous un gage de cette paix.
Quant au meilleur choix que la Chine pourrait faire, parmi les États, sans prononcer encore le mot d’alliance, de celui ou de ceux d’entre eux auxquels elle croirait de son intérêt de confier la réorganisation de son armée, — pour ne parler que de ce qui nous occupe plus particulièrement, — la question
- ↑ Au point de vue des intérêts internationaux eux-mêmes, la politique du démembrement et du partage de la Chine était considérée, par les plus éminens publicistes français, comme devant donner les plus funestes résultats. » Il faut agir énergiquement sur le gouvernement central, » écrivait M. Pierre Leroy-Beaulieu, au moment où l’on agitait cette question, sinon dans les chancelleries, du moins dans les feuilles publiques de tous les pays, « de façon à lui imprimer la conviction de la supériorité des forces de l’Occident sur les siennes ; d’autre part, rassurer ce gouvernement sur nos intentions à son égard et éviter d’affaiblir son autorité et son prestige dans les provinces. La politique du démembrement et du partage serait la plus détestable des solutions. » (Revue des Deux Mondes du 1er novembre 1900.)