Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 17.djvu/554

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

différens faits peuvent, au contraire, être cités à l’honneur de cette armée, car ils dénotent, de la part des chefs, une plus haute conscience qu’on ne se l’imagine communément, de leurs devoirs militaires et sociaux.

Et d’abord, son loyalisme envers les contingens alliés : la colonne Seymour, même après ses premiers engagemens contre les Boxers, a pu côtoyer, en effet, pendant plusieurs jours, des régimens de réguliers, sans être l’objet, de leur part, d’aucune manifestation hostile. Les actes d’hostilité n’ont commencé qu’après l’attaque, par nos escadres, des forts de Takou, attaque qui a été considérée par l’armée chinoise comme une déclaration de guerre.

En second lieu : le loyalisme de cette armée envers la Cour de Chine. Les troupes chinoises n’ont pas hésité, au début, sur nombre de points, à combattre les Boxers — comme perturbateurs de l’ordre public, — malgré la complicité des populations et des lettrés qui faisaient cause commune avec eux. L’on sait, en outre, que nombre de chrétientés, notamment des chrétientés indigènes, n’ont dû leur salut qu’à la protection qui leur a été assurée par les réguliers contre les Boxers.

Nous croyons devoir donner ci-après le récit de l’une de ces interventions de l’armée chinoise qui s’est dénouée par une aventure assez singulière : Le 5 août 1900, jour du combat de Peitzang, un missionnaire français, le Père Dehus, fut trouvé dans le camp chinois. Ce missionnaire raconta qu’il administrait une chrétienté, à vingt kilomètres environ au Nord-Est de Yang-Tsoun, au moment de l’explosion du mouvement boxer. Aux premiers troubles, il réunit dans un village catholique un millier environ de chrétiens indigènes et, grâce à quelques vieux fusils qu’il avait pu se procurer, il put tenir tête à toutes les attaques dont il fut l’objet de la part des Boxers des environs. Un général chinois, chargé du maintien de l’ordre dans cette région, se présenta avec de nombreux réguliers devant ce village. Il somma le Père Dehus de renvoyer ses fidèles chez eux, avec la promesse qu’il ne leur serait fait aucun mal ; il assura au Père lui-même la vie sauve et prit l’engagement par écrit de le renvoyer, sous bonne escorte, au consul français à Tien-Tsin. Le 4 août, le Père Dehus fut conduit devant le général Ma, commandant des forces chinoises, à Peitzang, qui lui déclara qu’il tiendrait l’engagement qui avait été pris de le ramener sain et