L’acte de la Déclaration d’Indépendance s’ouvre par cette affirmation considérée comme démontrée que tous les hommes naissent égaux. Du fait des réalités de la vie industrielle, cette évidence idéale a souffert quelques éclipses quand on s’est trouvé en face des problèmes nègre, indien et chinois. Il y a maintenant aux États-Unis environ 200 000 Indiens qui vivent sous le contrôle de ce qu’on nomme « le gouvernement indien. » Quarante écoles leur donnent une instruction spéciale. Cependant un quart seulement de cette population indienne arrive à soutenir, en anglais, la conversation la plus simple. Pour les étudians indiens de l’École Supérieure de Hampton qui, eux, prennent des grades en musique, en arts, en mathématiques, en langues vivantes, ils retournent fréquemment à leur tribu, recommencent à se tatouer, reprennent leurs mœurs sauvages, et affectent un oubli complet de tout ce qu’on leur a enseigné. Comment en faire des égaux ? Incapables qu’ils sont de subsister par eux-mêmes dans une société industrielle, ils sont tombés à la charge du gouvernement qui ne pouvait les élever à la dignité de citoyens. D’autre part, en 1888, le Congrès a publié un acte pour fermer aux ouvriers chinois l’entrée des États-Unis. On interdisait aux entrepreneurs d’employer, dans aucun service, ces Chinois qui, pour des motifs religieux, ne peuvent changer leur nationalité et, pour des raisons d’endurance physique et de sobriété inouïe, travaillent à des prix qui font une concurrence nuisible aux ouvriers américains.
Si l’on remonte aux causes qui, un jour, devaient armer le Nord contre le Midi et faire surgir le problème nègre, on s’avise que, au fond de cette question de race, comme dans toutes les autres, on retrouve des préoccupations industrielles.
À la fin du XVIIIe siècle, les planteurs des États du Sud n’étaient pas éloignés d’accepter, en matière d’abolition d’esclavage, les principes du Nord. Mais il arriva tout justement à cette minute qu’un jeune inventeur américain perfectionna la machine à carder le coton. Avant cette innovation, un nègre, travaillant du matin au soir, ne pouvait purifier que six livres de coton. Avec le secours de l’engin nouveau, un noir pouvait carder mille livres en un jour. C’était dans l’industrie cotonnière une révolution. En dix ans, l’exportation seule allait centupler. Dès qu’on vit quels profits on pouvait tirer d’une culture raisonner du coton, les sociétés qui s’étaient formées pour l’abolition de l’esclavage