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et l’avidité. Napoléon l’emporta : il semblait plus redoutable, il déclarait ne vouloir rien prendre et il promettait de donner beaucoup. Le traité d’alliance fut signé à Munich le 24 août. Le 6 septembre, Schwarzenberg somme l’Electeur de joindre ses troupes à celles de François II ; sinon, il le traitera en ennemi. Maximilien s’effare, se désespère. Otto accourt, le console, l’exhorte, le secoue ; il lui montre la couronne royale perdue, l’électorat avili, la sujétion autrichienne, la vengeance de Napoléon. Maximilien le crut et s’en trouva bien. Cette confiance fit de lui un roi. Toutefois il dut commencer par où les autres finissent. Dans la nuit du 8 au 9 septembre, il déménage en hâte avec ses ministres, sa cour, son trésor et ses troupes. Le 9, les Autrichiens franchissent l’Inn, mais ils ne trouvent que des arsenaux vides, une capitale évacuée ; ni prince à lier, ni armée à enrégimenter. La Bavière se faisait enlever, tout bonnement, sur simple promesse de mariage.

La Prusse exigeait, au préalable, une constitution de douaire, des articles de reprise, des réserves de divorce et tout un sous-contrat de secondes noces. Il y avait à Berlin, à l’armée, à la cour, un parti de la guerre, un parti de l’alliance russe, de la « grande alliance » qui régénérerait l’Europe, purifierait l’atmosphère politique et reléguerait, à leur place, les parvenus et les usurpateurs.

Frédéric-Guillaume fit ce que font les généraux nés pour les capitulations : il tint conseil, et consulta les plus perplexes des hommes, après lui-même, Brunswick, Schulenburg, Hardenberg, sans parler des sous-consultations secrètes de Haugwitz. Ces conseillers conférèrent le 22 août, après quoi, Hardenberg fit à Metternich cette remarquable déclaration : « Nos principes sont inébranlables ; le roi ne se départira pas de la plus stricte neutralité. » Mais s’entêter à la neutralité dans un pays sans frontières, entre deux empires qui se poussent l’un vers l’autre, c’est se jeter inévitablement dans les conflits. Or, ce roi irrésolu s’y précipitait par l’effet même de son indécision.

Le 27 août, Alopeus reçut, ainsi qu’il avait été décidé à Pétersbourg et qu’il en avait été averti, une lettre d’Alexandre pressant Frédéric-Guillaume de se joindre à lui. Alopeus devait en même temps annoncer des mesures, « tant militaires que diplomatiques, tendantes à persuader ou à contraindre la Prusse à faire cause commune avec la Russie et avec l’Autriche. »