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lui une petite provision d’huile, lors de sa fuite chez Laban, et frottant de cette huile, rituellement, la pierre sur laquelle il reposait sa tête lors de son fameux songe.

Caton l’Ancien nous donne des détails très précis et curieux sur la conduite d’un domaine occupé par des plantations d’oliviers. Il nous indique d’abord le nombre de têtes de travailleurs, libres ou esclaves, à installer sur la propriété ; il compte les bœufs et les ânes indispensables (il n’est question ni de chevaux ni de mulets) et n’oublie pas une pièce du matériel à installer. Plus d’un propriétaire étranger à la Provence centrale recueillerait dans le texte latin des conseils des plus profitables. « Cueillez, dit-il, l’olive aussitôt qu’elle est mûre, et ne la laissez que le moins possible sur la terre et le plancher, car elle y pourrit. » Les olives tombées à terre fournissent l’huile de qualité inférieure destinée à la consommation de la ferme. Il faut compter sur un sextarius (un peu plus d’un demi-litre) par tête et par mois[1]. Les soins de propreté à observer au moulin sont judicieusement exposés, et le vieux Romain conseille sagement, lorsqu’il recommande au propriétaire qui donne à forfait la cueillette de ses olives, d’empêcher qu’on ne les gaule, ce qui abîme l’arbre en détériorant surtout les rameaux fructifères.

Columelle, postérieur à Caton de deux siècles et plus expansif que lui dans son texte, se montre très enthousiaste à l’endroit de l’olivier. Il tient, dit-il, le premier rang entre tous les arbres, et, quoiqu’il ne rapporte du fruit que de deux années l’une, sur du bois de deux ans, l’année qui suit la taille, il n’occasionne du moins presque pas de dépenses, à la différence de la vigne, qu’il faut cultiver à grands frais, même les années où elle ne se charge point de raisins. Si les grosses olives sont meilleures à consommer, poursuit Columelle, les petites fournissent de meilleure huile, et cette remarque se vérifie encore de nos jours. L’agronome latin compte une dizaine de variétés d’oliviers ; on n’en cultive guère plus en France aujourd’hui. Columelle n’ignore pas non plus que les amendemens calcaires profitent à l’olivier. Suivent les règles relatives à la cueillette : elle doit s’opérer au mois de décembre, et nous apprenons que, chez les Latins, des

  1. Petite ration. Dans le Languedoc, où le propriétaire rural fait nourrir ses valets par son régisseur, on compte 10 litres d’huile par tête et par an, et la mesure allouée est plus forte dans l’arrondissement d’Arles, où le même mode de gestion se pratique souvent.