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Synode national, il annonçait l’intention de prohiber les synodes provinciaux et les communications habituelles des « colloques, » entre eux[1], il ne faisait qu’appliquer à l’Eglise protestante les mêmes règles de suspicion et de surveillance étroite qu’il appliquait déjà et qu’il allait appliquer de plus en plus à l’Eglise catholique.

Dans ces différens cas, les décisions royales étaient-elles, — selon l’expression d’un historien protestant[2], — « inattaquables au point de vue des théories modernes » de l’Etat ? Je ne le sais, mais, du moins, elles étaient en parfaite cohérence avec les visées désormais patentes de la royauté à l’omnipotence absorbante. Et c’est ce qu’en 1637, le commissaire royal Saint-Marc expliquait avec une violence fort claire au synode national d’Alençon[3]. Il ne s’agit plus dorénavant d’invoquer « droits ou privilèges ; » il faut se convaincre que maintenant on « dépend... uniquement... », comme tout le monde dans la nation, comme toute chose dans la vie nationale, « de la protection et de l’autorité souveraine du monarque. » Réconcilié avec la royauté, le protestantisme devait accepter le nivellement général exigé par cette « paix de l’Etat, » que les agens de Richelieu ont sans cesse à la bouche. Rentré dans les cadres d’une société hiérarchisée et soumise, il devait y accepter docilement, humblement, sa place au dernier rang. C’est l’ordre politique nouveau qui impose aux réformés des sacrifices, douloureux sans doute au sortir de l’indépendance ; mais, ajoutait l’orateur royal, « quoique le gouvernement ou le magistrat civil puisse quelquefois donner des ordres qui sembleraient être contraires à la liberté de vos consciences, faute d’en savoir les motifs, » ayez la foi, et n’ayez crainte : « Sa Majesté n’a pourtant pas pour cela aucun mauvais dessein contre votre religion. » C’est affaire, et c’est raison d’Etat.

Et enfin, ce qui peut bien faire croire à la sincérité de ces déclarations, ce qui atténuait singulièrement ces rigueurs, c’est que la plupart d’entre elles, et la plupart du temps, restaient lettre morte.

Cela, fallait-il l’attribuer, comme le fait plus tard le protestant

  1. Art. VII du Synode national de 1631.
  2. Gaufrés, dans le Bulletin historique du Protestantisme français, XXII. 421, à propos des collèges protestans.
  3. Aymon, Synode national, t. II, 534 ss.