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virulence qu’on ne lui connaissait pas. La longueur du banquet, les bravos de l’auditoire, le tumulte d’une salle où bouillonnaient toutes les ardeurs méridionales, semblaient avoir échauffé outre mesure son éloquence, malheureusement un peu triviale. M. Camille Pelletan, qui était à côté de lui, souriait dans sa barbe négligée : il se sentait vengé.

Il n’y a donc pas grand’chose à dire du discours de M. Combes : en dehors de l’éloge qu’il y a fait de lui-même, on n’y trouve rien. M. Combes a fustigé l’opposition et flétri ses calomniateurs. Mais ce qui est plus grave que son discours au banquet, c’est celui qu’il avait prononcé auparavant au congrès des Amicales, c’est-à-dire des délégations des instituteurs. Après les avoir, non pas loués, mais flagornés comme il convient, il les a poussés à entrer dans les luttes politiques, sous prétexte de défendre la République, et ces excitations, tombant de sa bouche officielle, adressées à des hommes auxquels il apportait fièrement les dépouilles des congrégations vaincues avec la liberté de l’enseignement, attisaient une fièvre qu’il aurait été sage et même décent d’apaiser. Ce qui est plus grave encore, c’est que tous les élémens révolutionnaires de Marseille se sont groupés autour de M. le président du Conseil, menaçans, frémissans, annonçant des revanches prochaines. Le héros de la fête a-t-il été vraiment M. Combes ? N’a-t-il pas été plutôt M. Flaissières, l’ancien maire qui aspire à reconquérir sa place perdue ? M. Flaissières a festoyé, harangué, triomphé à côté de M. Combes. On se rappelle que, pendant son ministère, M. Waldeck-Rousseau avait refusé de le recevoir : c’était au moment d’une de ces grèves qui ont coûté si cher à Marseille et dans lesquelles sa responsabilité personnelle était si évidemment engagée. M. Flaissières a conduit au-devant de M. Combes à la gare, puis au banquet, toute la bande bruyante de ses amis ; il semblait être le véritable ordonnateur de la fête. C’est à cela surtout qu’aura servi le voyage de M. Combes. De son discours, il ne reste déjà rien ; mais il reste de son passage à Marseille un nouvel élan donné au parti révolutionnaire, car il faut l’appeler par son nom ; et il y a lieu de craindre que, partout où passera désormais M. Combes, il n’obtienne le même résultat.


FRANCIS CHARMES.


Le Directeur-Gérant,

F. BRUNETIERE.