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Commercial Committee de la Chambre des communes. En somme, ce sont des membres de la Chambre des communes qui fêtaient des membres de notre Chambre des députés. D’un côté comme de l’autre, toutes les nuances de partis s’étaient effacées, toutes les opinions étaient représentées. Sir Henry Campbell Bannerman, chef de l’opposition, se trouvait au banquet à côté de MM. Balfour et Chamberlain, l’un premier ministre et l’autre membre très considérable du gouvernement. On a été parfaitement aimable les uns pour les autres, avec une pointe d’ironie, et M. d’Estournelles a pu croire que son influence pacifiante s’était étendue sur les Anglais comme sur les Français, en attendant qu’elle s’étende sur le reste du monde, ce que nous souhaitons de tout notre cœur. Il n’y avait pas au banquet de membres de la Chambre des lords, de ceux du moins qui font partie du gouvernement ou qui sont à la tête de l’opposition : il n’y avait, par exemple, ni lord Lansdowne, ministre des Affaires étrangères, ni lord Rosebery. Notre ambassadeur, M. Paul Cambon, n’y assistait pas non plus. Si nous en faisons la remarque, ce n’est pas pour diminuer l’importance de la manifestation, mais pour en préciser le caractère. M. d’Estournelles, qui a très habilement préparé cette rencontre, en a bien choisi l’heure. Que serait-il arrivé, s’il avait conçu son projet et s’il avait voulu l’exécuter un an plus tôt ?

L’objet principal de la fête était de faire une manifestation en faveur de l’arbitrage international. C’était la préoccupation personnelle de M. d’Estournelles, et le discours qu’il a prononcé l’a exprimée avec éloquence. Du côté anglais, on paraissait songer surtout à améliorer d’une manière générale les rapports des deux pays et à les mettre sur un pied de confiance et de bonne amitié, avec la persuasion que c’était là ce qui importait le plus. Quand les cœurs sont d’accord, tout devient plus facile. Les conflits disparaissent comme par enchantement. Les questions qu’on n’osait même pas aborder se règlent sans effort. En un mot, il suffit de substituer une atmosphère de sympathie à une atmosphère de mauvaise humeur pour que les nuages se dissipent et que les relations deviennent cordiales. En sommes-nous là ? Nous le souhaitons vivement, et les manifestations de ces dernières semaines, les unes officielles, les autres officieuses, permettent de l’espérer. Ce serait un grand bienfait ! On a beaucoup insisté, au banquet de Londres, sur ce qu’il y avait de nouveau, d’inopiné, presque d’extraordinaire dans le fait des deux parlemens qui, sans avoir besoin d’intermédiaire, échangent des invitations l’un avec l’autre ; et, en effet, un pareil phénomène n’a pas de précédent. Nous ne savons pas s’il inaugure,