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trouvée pour faire vivre le pape et le roi côte à côte est qu’ils aient l’air de ne pas se voir.

Une preuve de la confiance que le cardinal Sarto a su inspirer à ses collègues du Sacré-Collège est qu’après les deux règnes pontificaux les plus longs de l’histoire de l’Église, il a été élu pape à un âge qui lui permet d’avoir à son tour un long pontificat. On pouvait craindre qu’embarrassé entre des compétitions diverses, le Conclave, décidé à n’en faire triompher aucune, n’adoptât un expédient provisoire qui ne découragerait ni les espérances, ni les intrigues, et lui donnerait à lui-même le moyen de préparer, pour une échéance prochaine, une solution plus stable. Le Conclave n’a pas fait ce calcul. Il a compris que des changemens trop fréquens auraient beaucoup plus d’inconvéniens que d’avantages, à la tête de l’Église, et il a choisi un homme qui, s’il a dépassé la maturité, peut fournir encore une carrière étendue, puisqu’il a exactement l’âge qu’avait Léon XIII lorsqu’il a été élu en 1878. À ce point de vue encore, le Conclave a fait preuve de sagesse.


Si nous n’avons rien dit, il y a quinze jours, des manifestations qu’ont faites en commun un certain nombre d’hommes politiques français et d’hommes politiques anglais, ces derniers surtout pris parmi les plut, importans, ce n’est pas que nous en méconnaissions le très grand intérêt ; mais le pape venait de mourir ; devant cet événement, l’autre pâlissait. Nous espérions bien d’ailleurs que M. d’Estournelles de Constant nous donnerait de nouvelles occasions de parler de l’initiative qu’il a prise. Nous ne savons pas quelles en seront toutes les conséquences ; mais elle a été originale dans la forme, et très heureuse dans les premiers résultats qu’elle a produits, puisqu’elle a encore accentué le rapprochement qui s’est opéré entre la France et l’Angleterre ; et cela seul suffirait à mériter une pleine approbation. Après le voyage du roi Edouard et celui de M. Loubet, a eu lieu celui des parlementaires français à Londres, où ils ont été reçus avec cette bonne grâce exquise que les Anglais savent mieux que personne mettre dans leur hospitalité. On dit en effet : l’hospitalité écossaise, on devrait dire l’hospitalité britannique ; il n’y en a pas de plus accueillante, ni de plus captivante. Nous parlons cette fois de celle des simples particuliers, car le voyage de nos députés ou sénateurs, accompagnés de quelques représentans de notre commerce, n’avait et ne pouvait avoir aucun caractère officiel. L’invitation à laquelle ils ont répondu leur avait été adressée par le