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abondent et à leurs pieds s’étendent à perte de vue des champs de froment, de luzernes et de légumes : le pays est un immense jardin que cultive une population de cinquante mille agriculteurs. Sa capitale, Ménamah, est le centre du commerce des perles et de la nacre. Près de quinze cents bateaux appartiennent à son port, qui sert en outre de rendez-vous à trois ou quatre mille embarcations. Le cheïk de Bahréïn, auquel tout marchand de perles, tout maître d’embarcation, tout plongeur doit l’impôt, est un des riches potentats de l’Orient. Aussi la Turquie, la Perse, l’Oman, le royaume wahabite, se disputaient l’avantage de compter cet opulent personnage parmi leurs vassaux. C’est le gouvernement de l’Inde qui, en jouant le rôle du larron de la fable, les mit tous d’accord.

Aujourd’hui Ménamah est devenu la résidence de l’agent politique anglais, qui juge lui-même les différends s’élevant entre les pêcheurs de perles et qui dispose d’une flottille pour maintenir l’ordre parmi eux. Dans ces derniers temps, le rayon d’action de ce résident s’est encore étendu. Des actes de piraterie ayant été commis par des habitans de la presqu’île de Katar, le résident anglais, après avoir fait bombarder les ports de Zabara et de Wokra, a imposé le protectorat de l’Angleterre à cette région. Cet acte peut être considéré comme le premier pas dans la voie de la prise de possession effective par l’Angleterre de la côte orientale d’Arabie.


IV. — L’EXTENSION DU PROTECTORAT ANGLAIS SUR L’ARABIE MERIDIONALE

Nous avons vu que l’Etat d’Oman, dans les limites qu’on s’accorde à lui reconnaître actuellement, s’arrête sur la côte méridionale d’Arabie au cap Mirbât. Au-delà, vers l’ouest, et lui faisant suite jusqu’aux possessions turques de l’Yémen, se développe, sur une longueur de huit cents kilomètres environ, une zone littorale qui borde l’océan Indien. C’est l’Hadramaout. Cette côte se distingue par une grande uniformité d’aspect et de relief. C’est, à partir de la mer, un amoncellement de buttes et de hauteurs volcaniques isolées, s’élevant graduellement en terrasses jusqu’à un plateau calcaire, lequel va s’inclinant au nord, c’est-à-dire vers le désert, où il se termine brusquement par une muraille de trois cents mètres de haut, véritable falaise dont le pic s’enfonce dans une mer de sables. Du désert à la