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telle ou telle échelle, mais à plein développement. Ces signes à la craie, ces lignes qui courent parallèlement, ou se coupent, ou se croisent ; qui s’entremêlent et s’emmêlent ; où l’œil, à moins d’un exercice particulier, d’une aptitude acquise, ne peut rien suivre, ni distinguer, ni reconnaître, qui ne prennent de sens et de direction que de repères invisibles et inintelligibles au passant, cette toile d’araignée de signes et de lignes, c’est un torpilleur, c’est un paquebot, c’est l’avant ou l’arrière, la moitié d’un croiseur ; et c’est quelquefois le torpilleur, le paquebot, le demi-croiseur interposés, superposés, l’un dessous, l’autre dessus, l’un en dedans, l’autre en dehors. Le contre-maître, cependant, va sûrement dans ce labyrinthe pour nous inextricable, et il reproduit, il copie, il calque, en des découpures de tôle mince, les pièces nécessaires, les pièces calculées, dessinées et voulues une à une dans leur forme et leur dimension.

Ici et ainsi commence la matérialisation de l’idée, la réalisation du plan, qui se poursuit à l’atelier des modèles, où l’on refait en bois ce que le dessinateur a fait sur le papier : modèles en bois du navire tout entier et de chaque section, membrure ou organe du navire. Administrativement, industriellement, les chantiers de G… se composent de trois groupes : 1° les ateliers de scierie et de menuiserie (avec l’atelier des modèles) ; 2° les ateliers de chaudronnerie de fer, comprenant le barrotage, la tôlerie, le perçage, le poinçonnage, le cintrage des tôles, cornières et profilés ; 3° les ateliers d’armement, c’est-à-dire l’ajustage, les forges, la chaudronnerie en cuivre, le zingage.

Dans ces trois groupes d’ateliers travaillent des ouvriers appartenant à toutes les professions à peu près : menuisiers, tourneurs sur bois, modeleurs, chaudronniers en fer, aides et apprentis, trempeurs, pilonniers, cloutier et aides-cloutiers, boulonnier, ébarbeur, charpentiers, aides et apprentis. Joignez-y gréeurs, riveurs et teneurs de tas, chauffeurs de clous, chanfreineurs, ajusteurs et apprentis, électriciens, tourneurs sur métaux, taraudeurs, outilleur, affûteur, meuleurs, mortaiseur, raboteurs, scieurs de métaux, enrouleurs de tôles, épauleurs, cisailleurs et poinçonneurs, perceurs et fraiseurs à la machine, perceurs à la main, et leurs aides : au total, une trentaine de métiers du bois et du fer. Joignez-y, en outre, des ouvriers du bâtiment : maçons, aides-maçons, peintres et apprentis, bourrelier, vannier ; — car nous sommes loin aujourd’hui du tronc