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et Chauveau, composer sa ration non point d’une viande quelconque grossièrement dégraissée par la main du bouclier, mais d’une viande subtilement débarrassée par l’artifice du physiologiste de tous ses hydrates de carbone ou de toute sa graisse. On le nourrira, par exemple, de la chair d’un animal préalablement inanitié à fond, c’est-à-dire d’un animal mort de faim ou de travail.

C’est ainsi que l’on procède dans les expériences destinées à établir l’origine protéique possible du glycogène. Le sujet en expérience, — supposons que ce soit un chien, — avant de recevoir cet aliment purement protéique, a lui-même été soumis préalablement à un jeûne de quinze jours qui aura fait table rase du glycogène hépatique préexistant. Alors, tout est prêt pour une expérience significative. — Réalisée avec ces précautions, l’épreuve a montré que le glycogène reparaissait en proportions notables dans le foie et dans les muscles du chien uniquement alimenté de matières azotées protéiques. Ce glycogène, qu’on a trouvé dans le foie dans la proportion presque normale de 2 et 3 pour 100, était bien un glycogène de nouvelle formation, puisque tout celui qui préexistait avait préalablement disparu ; il provenait nécessairement de l’aliment protéique, puisque le sujet de l’expérience n’en avait point reçu d’autre. Il resterait toutefois encore la possibilité que ce glycogène hépatique nouvellement formé dérivât des protéiques des tissus du sujet lui-même : — alors la conclusion serait la même, — qu’il provînt des graisses, des tissus, — et cette hypothèse a été écartée.

Nous n’avons rapporté cette expérience, qui est un des types moyens de cet ordre de recherches, que pour donner une idée des difficultés dont elles sont hérissées. Il faut réfléchir, de plus, que mille incidens peuvent en traverser l’exécution, et l’on s’expliquera ainsi que tant de temps et d’efforts aient été nécessaires pour éclaircir cette question si simple en apparence de l’origine du glycogène hépatique, et par-là du sucre du sang.

Le résultat si laborieusement acquis n’est pourtant pas encore tout à fait à l’abri des discussions. Voici que le savant physiologiste de Bonn, E. Pflüger, dans une belle monographie parue au mois d’avril de cette année et consacrée à l’exposé de ses propres recherches et de celles de ses émules sur la glycogénie, ne craint pas de mettre en doute la signification qu’on attribue à la formation du glycogène aux dépens des matières protéiques. Il