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REVUES ÉTRANGÈRES

JANE WELSH CARLYLE
D'APRÈS DES DOCUMENS NOUVEAUX


New Letters and Memorials of Jane Welsh Carlyle, annotated by Thomas Carlyle and edited by Alexander Carlyle, 2 vol. in-8o, illustrés. Londres, John Lane, 1903.


Les lecteurs de la Revue n’ont certainement pas oublié l’attachant récit que leur a fait naguère Mme Arvède Barine, d’après des documens qui venaient de paraître en Angleterre, du martyre domestique de Mme Carlyle[1]. Ils ont gardé présente devant leurs yeux l’image de cette pauvre femme, remarquablement belle, intelligente, et bonne, qui, ayant daigné se donner à un homme d’une condition fort au-dessous de la sienne, avait été condamnée par lui au rôle d’une servante, ou encore d’une esclave prisonnière, s’était vue contrainte à habiter, seule avec lui, le désert sinistre et malsain d’une ferme d’Ecosse, puis, transportée de force à Londres, non seulement y était restée soumise toute sa vie à la même servitude, mais avait dû encore assister sans se plaindre aux relations familières de son terrible maître avec une grande dame toujours prête à l’humilier de son mépris, jusqu’à ce qu’enfin elle eût « succombé à la peine, » attestant une fois de plus, par son exemple, ce que comportait de souffrances matérielles et morales l’honneur d’être la femme d’un homme de génie. Et bien qu’une telle image ait tout de suite péniblement surpris ceux qui avaient eu l’occasion de connaître Carlyle, force leur était de la tenir

  1. Voyez la Revue du 15 octobre 1884.