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la liste de ses ouvrages et d’appréciations dues à tous les commentateurs ; ces extraits de livres, journaux et revues ne sont là que pour tenir de la place ; M. Catulle Mendès a cru avec trop de modestie qu’il pouvait substituer avantageusement à sa plume de critique les ciseaux de l’Argus de la presse. S’il s’agissait ici de l’ouvrage d’un critique de profession, nous aurions sans doute à relever certaines opinions singulières de l’auteur sur divers points de l’histoire de notre littérature, et nous pourrions nous étonner de la forme souvent déconcertante qu’il leur a donnée. Mais lui aussi, comme son ministre, M. Mendès est poète : il est lyrique, fantaisiste, boulevardier. De là sans doute ce généreux emploi de l’hyperbole, ces envolées soudaines, ces attendrissemens subits, ces accès de colère imprévus, ce mélange de grandiloquence et de familiarité. Ces pages sont la preuve éclatante que pour avoir été parnassien on n’est pas forcé d’être impassible. Au surplus nous avons hâte d’arriver au sujet même du travail de M. Mendès.

C’est l’un des plus considérables qu’il y ait dans l’histoire littéraire contemporaine, puisqu’il ne s’agit de rien moins que de suivre le développement de la poésie française pendant toute la seconde moitié du XIXe siècle. M. Mendès avait à reprendre les choses au point où les avait laissées Théophile Gautier. À cette date de 1867 vient de commencer le mouvement poétique qu’on désigne sous le nom de parnassien. M. Mendès y a été mêlé. Il pouvait donc nous en entretenir avec une compétence toute particulière. Comme d’ailleurs les destinées du groupe parnassien sont aujourd’hui pleinement accomplies et que l’école a depuis lors cédé la place à une autre qui elle-même appartient déjà au passé, il avait le recul nécessaire pour embrasser d’ensemble et à son juste point de vue cette période de notre littérature. Il fallait sans doute remonter à quelques années en arrière pour rechercher les origines du mouvement ; après quoi il restait à énumérer les tendances qui lui ont donné sa valeur et sa portée, à nous les montrer dans leur plein épanouissement pour les suivre enfin dans leur déclin et nous faire assister à la désorganisation de la formule, au dessèchement de l’arbre à bout de sève. Il n’était pas sans intérêt non plus de savoir à quelles causes un parnassien d’antan attribue la réaction qui s’est faite contre l’école parnassienne, et dans quelle mesure il juge légitime la tentative des symbolistes. Telles sont bien les questions que devra examiner quiconque traitera de l’histoire de la poésie dans la seconde moitié du xix6 siècle et auxquelles on cherchera une réponse dans le rapport de M. Mendès ; je crains seulement qu’on