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Birmanie à la visite des pagodes. La plus belle pagode de Rangoon est bâtie sur une montagne, aux portes de la ville, au-dessus de deux petits lacs qui lui font une jolie perspective de jardins anglais bien tenus. C’est un monument vénéré, remontant, dit-on, à la plus haute antiquité, quelque chose comme quinze siècles avant Jésus-Christ. Mais les perturbations de toutes sortes, les révolutions et les guerres, l’ont plus d’une fois détruit. Tel qu’il est, ce temple date seulement de quatre cents ans. La dagoba centrale, entièrement dorée, est surmontée d’un clocheton d’or massif qui étincelle à plus de 100 mètres de hauteur. Tout autour est une immense esplanade, encombrée de petites chapelles et de petits temples, de maisons en bois sculpté pour les prêtres, d’abris protecteurs pour les énormes cloches sacrées. Des arbres séculaires poussent entre les dalles qu’ils disjoignent et versent sur les fidèles leur ombre bienfaisante. On fait de tout dans ce sanctuaire : on prie, on dort, on mange et on joue au ballon. On y parvient par un long escalier couvert, aux marches glissantes et vermoulues, qui contient de chaque côté d’innombrables échoppes où se vendent des objets de piété, des cierges, des fleurs sacrées, des bâtonnets d’encens et aussi des gongs, des joujoux grossiers, des soies birmanes et des serviettes anglaises. Nous y rencontrons de longues files de pèlerins, des petites femmes qui fument et qui sourient, et de nombreux mendians qui nous poursuivent de leurs demandes et de leurs plaintes.


MANDALAY

Il faut dix-neuf heures de chemin de fer pour se rendre de Rangoon à Mandalay. Heureusement on passe la majeure partie de ce temps à dormir dans des wagons confortables et bien aménagés pour la nuit. Le trajet en lui-même, dans une vallée éternellement plate, est peu intéressant. Il n’en est pas de même de Mandalay, capitale des souverains birmans, où le dernier d’entre eux régnait encore, il y a vingt ans. Au centre, se trouve une immense enceinte entourée d’un mur crénelé et de fossés pleins d’eau larges de 60 mètres. C’était la cité royale où le monarque avait ses palais, ses temples, ses courtisans et ses soldats. Tout autour se trouve la ville proprement dite, faite de grandes avenues plantées d’arbres, se coupant à angles droits, et allant, pour ainsi dire, indéfiniment dans la campagne. Cette grande