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envahissement de la Prusse. La France fournirait aux États du Sud le moyen de s’assurer une existence sérieuse et indépendante. Peut-être même réussirions-nous à atténuer le danger que la Confédération du Nord peut créer pour le repos de l’Europe et la sécurité de la France[1]. »

Les Russes préféraient la grandeur de la Prusse à celle de l’Autriche. La grande-duchesse Marie, en envoyant à Talleyrand la réponse du Tsar à une lettre de l’Empereur, lui écrivait : « Il serait fort à désirer que l’empereur Napoléon écrivît directement à l’empereur Alexandre, qui a le sincère désir d’aller d’accord avec lui et veut connaître les idées de l’Empereur des Français sur la reconstitution de l’Allemagne. On trouve naturel que la Prusse victorieuse soit avantagée, et dans tous les cas on préfère une Prusse puissante à une Autriche puissante (13 juillet). » Néanmoins les Russes ne se résignaient pas à regarder les bras croisés le remaniement de cette Allemagne dont ils avaient été si longtemps les régenteurs. Impatienté de ne recevoir aucune communication de Paris, Gortchakof prit l’initiative, et il eut la naïveté de revenir sur son projet de congrès en sollicitant le concours de la France et de l’Angleterre. A défaut de congrès, il leur proposait de déclarer que, « comme signataires des transactions qui ont organisé l’Allemagne, elles se réservaient en principe de participer aux changemens qui s’accomplissaient. »

En Prusse, on était attentif et non sans inquiétude. L’armée, depuis les plus illustres généraux jusqu’aux sous-lieutenans, s’exprimait sur la France avec sympathie et reconnaissance. Un régiment de uhlans défilait un jour devant le prince Frédéric-Charles qui causait avec Lefebvre de Béhaine : « Voilà, dit le prince, un bon régiment, que Napoléon Ier estimait. Il a fait en 1812 la campagne de Russie, il était de la Grande Armée, est entré à Moscou, où l’Empereur a proclamé ses hauts faits. » En toute occasion, c’étaient des propos, des allusions de cette nature, tendant à être aimables, que troublait à peine la crainte de nos demandes de compensation, dont on commençait à s’entretenir. Govone causait à Nikolsburg, avec un officier du corps de Steinmetz : « En général, disait celui-ci, nous désirons la paix, mais elle ne sera pas longue. — Et pourquoi ? — Parce qu’on dit que les Français veulent prendre les provinces du Rhin,

  1. Lefebvre de Béhaine à Drouyn de Lhuys, 11 août 1866.