et ne pas rendre ses devoirs à la première princesse du sang, c’était une situation qui ne pouvait durer. Vendôme le comprit ; après avoir tenu bon pendant huit ou dix jours, il se retira à Anel. Il se flattait d’y voir, comme durant le séjour qu’il y avait fait en 1706, affluer les courtisans, et il comptait que cette affluence serait une manière de prendre parti pour lui. Il fut déçu. Le maître avait parlé, ou plutôt il n’avait pas parlé ; mais il avait témoigné par son attitude et par ces nuances dont il avait le secret, que si Vendôme n’était pas en disgrâce, cependant ce n’était pas, suivant une expression dont Louis XIV se servait souvent « bien lui faire sa cour » que de se ranger publiquement du côté du châtelain d’Anet. Vendôme s’en aperçut. Les uns manquèrent à l’engagement qu’ils avaient pris de l’aller voir ; les autres, après avoir promis, s’excusèrent. Anet devint une solitude. Vendôme était vaincu. Si, à Oudenarde, le mari avait perdu ses positions, à Versailles, la femme demeurait maîtresse du champ de bataille.
A la Cour, Louis XIV était encore obéi, mais, au dehors, il ne commandait plus à l’opinion. Il ne put la ramener au Duc de Bourgogne. Personnellement le jeune prince, qui revenait en vaincu, n’avait pas produit une impression favorable. Il n’avait pas assez dissimulé, après une si triste campagne, la joie qu’il éprouvait à se retrouver à Versailles. Sa gaieté parut déplacée, et Saint-Simon lui-même lui en fit faire l’observation par Beauvilliers. On lui reprochait sa bonne mine, et il est certain qu’il avait engraissé. Aussi les faiseurs de couplets continuaient-ils d’aller leur train. L’un d’eux s’adressait à la Duchesse de Bourgogne, et, après avoir fait une allusion ordurière au faible qu’elle avait autrefois laissé apercevoir pour Nangis, qui venait de se distinguer dans cette campagne, il continuait :
- Princesse, les combats
- Te coûtent trop d’alarmes,
- Ne verse plus de larmes.
- Il revient, gros et gras,
- Ne t’en étonne pas.
La victoire remportée par elle sur Vendôme achevait d’indisposer l’opinion. Vendôme était plus populaire que le Duc de Bourgogne. On le voyait tenu à l’écart. On se demandait si le général qui, en Italie, avait triomphé de Victor-Amédée et du