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sécurité que le nouveau régime donnait aux capitaux étrangers, obtenir plus aisément le concours de ces derniers. Une étude attentive des budgets et de l’histoire financière du Japon pendant ces dernières années est concluante à cet égard. Il serait tout aussi inexact d’attribuer les difficultés contre lesquelles il a dû lutter à la réforme monétaire, que de prétendre que le krach berlinois de 1873 a été dû à l’adoption de l’étalon d’or par l’Empire allemand lors de sa fondation.


IV

Nous avons déjà fait justice, dans la Revue, des argumens de ceux qui nous prédisaient les pires catastrophes si l’argent venait jamais à être déchu de sa vertu monétaire et réduit au rôle de simple monnaie divisionnaire[1]. D’après les prophètes, une baisse effroyable des prix devait en résulter, baisse qui frapperait en particulier les objets de première nécessité et ruinerait l’agriculture. Nous avions beau leur montrer que les blés, qui viennent faire concurrence aux nôtres sur les marchés européens, sont récoltés, pour la majeure partie, dans des pays à étalon d’or, tels que les Etats-Unis : ils ne voulaient rien entendre et persistaient à accuser de tous leurs maux, réels et imaginaires, la doctrine du monométallisme et l’adoption de l’étalon d’or par un nombre croissant de nations. Cependant les événemens ont marché : chaque année est venue apporter un nouveau contingent d’argumens à ceux qui soutiennent que les prix se règlent avant tout d’après l’offre et la demande de chaque espèce de marchandises ; que la quantité totale de monnaie en circulation joue un faible rôle dans la fixation des prix ; que le maintien de l’or et de l’argent comme métaux libératoires, dans un rapport déterminé par la loi, est une source constante de difficultés et d’embarras ; et que les fluctuations quotidiennes du marché des métaux précieux dérangent à chaque minute l’équilibre factice ainsi échafaudé. Enfin, le développement inouï de la production aurifère, un moment ralenti par la guerre du Transvaal, reprend sa marche en avant et nous promet d’atteindre, à brève échéance, le chiffre de 2 milliards.

Nous sommes en présence d’un fait acquis d’une façon

  1. Voyez notre article du 15 septembre 1891 sur la Hausse du blé et la baisse de l’argent.