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de marcher beaucoup plus vite ; sur les cinquante minutes qu’ils passent à descendre du Pont d’Austerlitz à Auteuil, — soit 9 kilomètres et demi, — les treize escales, où ils doivent stopper, leur font perdre vingt-cinq minutes. Ils pourraient en regagner dix ou quinze entre les stations en accélérant leur allure actuelle de 10 kilomètres à l’heure ; mais l’administration s’y oppose, parce que les berges du fleuve et les établissemens riverains souffriraient du déplacement d’eau que comporte une vitesse plus grande.

Depuis 1867, date de son introduction à Paris, jusqu’à ce jour, ce mode de transport offre aux voyageurs un maximum invraisemblable de sécurité. Entre bateaux de commerce, il se produit, chaque année, dans la traversée de la capitale, une centaine de collisions ; il en sombre une trentaine. Ces naufrages ou ces avaries ne sont pas sans faire quelques victimes parmi les marins. Sur les « bateaux-omnibus, » en trente-cinq ans, on n’a jamais eu à signaler un seul cas d’accident mortel.

Lorsqu’ils vinrent de Lyon, où, depuis 1855, ils avaient pris possession de la Saône, la Seine se prêtait mal à un service analogue. Le mouillage qu’elle offrait pendant la saison des basses eaux était faible et variable ; le barrage de Suresnes n’existait pas, et la navigation n’était possible que dans la partie la plus profonde du chenal. Le passage autour des îles était encombré par plusieurs rangées de constructions flottantes. D’anciennes fondations de pompes ou de piles démolies constituaient, sous certaines arches de ponts, des écueils infranchissables. Les « Mouches » sillonnaient la rivière depuis deux ans à peine, que déjà elles transportaient 8 millions de voyageurs ; ce chiffre, en 1887, avait doublé ; en 1899, il s’élevait à 28 millions et à 42 millions l’année suivante, grâce à l’Exposition universelle, depuis laquelle il a sensiblement décru.

Durant cette période, alléchées par leur succès, les « Hirondelles » étaient venues leur disputer la clientèle et, peu après que les deux rivales eurent fusionné sous le nom de « Bateaux-Omnibus, » de nouveaux concurrens, les « Express, » surgirent en vue de prendre leur part du trafic.

Propriétaire du matériel de ces diverses entreprises perfectionné par elle, la Compagnie actuelle possède une flotte de 100 bateaux, d’une valeur initiale de 15 millions de francs, qui ne marchent tous ensemble qu’aux jours des plus fortes recettes :