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importe d’ailleurs à qui elle incombe. Seulement l’administration se rend compte que- vainement elle ferait les gros yeux et élèverait la voix. La menace d’une « déchéance » éventuelle n’est pas pour effrayer des industriels en possession d’un privilège qui les ruine.

La compagnie des Omnibus, maintenant que son bénéfice, — de 3 centimes par voyageur en 1860, — après s’être réduit progressivement à un quart de centime en 1899, est aujourd’hui totalement évanoui, a, comme les autres, intérêt à braver cette « déchéance. » Peut-être l’eût-elle fait déjà sans l’interprétation contentieuse que soulève, pour les exercices antérieurs, un certain article 6 de son cahier des charges, relatif au partage des bénéfices entre elle et la ville de Paris. Elle doit, en tout cas, pour subsister, remanier son réseau de fond en comble ; cette doyenne des entreprises parisiennes, en quelque sorte expropriée par ses cadettes, cherche maintenant ses voies et sa vie au milieu des nouveaux modes de transport.


IV

La plus redoutable mine le sol sous les pieds de ses chevaux et enlève aussi à la route fluviale une partie de ses voyageurs. Les bateaux éprouvent, malgré leurs modestes tarifs, les effets de cette concurrence. Sur cette gaie rivière aux quais bordés de palais, le trajet, au printemps, en été, est une promenade charmante. L’un des hauts fonctionnaires du Métropolitain, qui, de son domicile à son bureau, a le choix entre les tunnels de sa Compagnie et le pont ensoleillé des « Mouches, » m’avouait qu’il donnait toujours la préférence à ces dernières. Mais, par le froid et le mauvais temps, les berges sont peu engageantes, les stations semblent d’un accès difficile et, en toute saison, la rapidité des wagons l’emporte sur celle des bateaux.

Aussi la Compagnie qui les exploite a-t-elle vu depuis trois ans ses titres tomber de 750 à 200 francs, et ses bénéfices réduits à fort peu de chose, depuis la mise en service des voies ferrées qui courent, parallèles à la Seine. Incapables d’abaisser leurs prix, puisqu’ils n’exigent que 10 centimes pour un trajet de 15 kilomètres, du Point-du-Jour à Charenton, les bateaux auraient pu tenter de lutter par un accroissement de vitesse. Leurs machines, d’une force de 80 à 100 chevaux, leur permettraient