d’études et de recherches, un érudit anglais, M. Langton Douglas. Certes on ne saurait souhaiter une histoire plus savante, plus claire, mieux ordonnée et plus instructive. Mais l’auteur, qui se rend parfaitement compte, pourtant, de ce que la race siennoise a toujours eu d’anormal et d’exceptionnel, se borne à faire défiler devant nous la série de ses guerres, de ses révolutions, de ses victoires et de ses échecs, comme s’il avait à nous parler, simplement, d’une petite république italienne pareille à vingt autres, de Pistoie, par exemple, ou de San Gimignano. Attentif à interpréter les moindres documens, il néglige de dégager, de leur ensemble, le curieux phénomène historique qu’a été l’âme siennoise. Il ne prend point la peine de nous expliquer par où cette âme a toujours différé de celle de Florence, l’éternelle rivale de Sienne, ni d’où lui est venue cette mystérieuse et profonde unité morale qui, aujourd’hui encore, s’exprime pour nous non seulement dans toute l’œuvre des artistes siennois, depuis Duccio et Jacques della Quercia jusqu’à Beccafumi, mais survit, à jamais fraîche, souriante, ingénue, et belle, à l’ombre des vieux murs rouges de la plus admirable des villes. Il ne prend point la peine de nous expliquer cela, qui aurait dû être, cependant, à la fois le fondement et l’objet de son récit. Sienne, telle qu’il nous la montre, n’est que l’ombre inanimée de cette Sena vetus, civitas Virginis, dont ses pires ennemis eux-mêmes ne parlaient qu’avec une surprise mêlée de respect. Ou plutôt son livre nous montre bien la véritable Sienne : mais nous avons à l’y chercher dans les notes, dans les appendices, dans toute sorte de menues anecdotes extraites des chroniques locales, et d’ailleurs choisies et traduites le plus intelligemment du monde, mais qui, si l’écrivain anglais avait voulu les réunir, les confronter, et en tirer les conclusions qu’elles impliquent, nous auraient ensuite permis de suivre avec un intérêt infiniment plus vif le récit des héroïques « folies » du peuple siennois.
Voici, par exemple, comment les Siennois, en 1234, s’étant emparés de la citadelle florentine de Campiglia, prirent leur revanche de l’atroce cruauté qu’avaient montrée à leur égard les Florentins, cinq ans auparavant, après la bataille de Camollia : « La ville fut mise à sac, détruite, et brûlée, parce que ses habitans avaient, jusqu’au bout, refusé de se rendre. Mais toutes les femmes furent envoyées à Sienne, et aucune injure ne leur fut faite. Et nombre d’entre elles restèrent veuves, ayant perdu leurs maris dans cette défense. Mais celles dont les maris se trouvaient parmi les prisonniers furent, par compassion, rendues à eux, bien qu’elles n’eussent aucun moyen de payer