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d’ailleurs avec une rare habileté et dont finalement elle sortit triomphante et grandie.

Rien de plus compliqué que l’histoire politique de l’Angleterre depuis la chute de Danby jusqu’au Parlement d’Oxford de 1681. Accusant le lord trésorier de l’avoir trahi, Louis XIV fut la cause indirecte de sa disgrâce en fournissant à Montaigu, ambassadeur de Charles II à Paris, le moyen de prouver les relations secrètes qu’il avait eues avec la France. Indirectement atteinte par le malheur de Danby, la duchesse ne comptait guère que des ennemis dans le gouvernement très composite qui lui succéda et qui avait comme membres principaux Shaftesbury, Temple et Halifax. C’était l’avènement de la faction parlementaire, antifrançaise et anticatholique. Un seul ami dévoué de Madame de Portsmouth, y figurait : le comte de Sunderland, esprit net et pénétrant, doué, au jugé d’un de ses ennemis, du plus grand génie pour les affaires, caractère médiocre d’ailleurs, « changeant de parti comme d’habit. »

Il semble que, malgré le triomphe momentané de l’opposition, la duchesse et lui essayèrent d’abord, une fois de plus, en dépit de la défiance que pouvait leur inspirer le sort de Danby, de resserrer cette alliance intime avec la France qui était le rêve de Madame de Portsmouth, Moyennant un subside de 4 millions de livres par an, payé par Louis XIV à Charles II, le roi, dit la duchesse, renverra son ministère et vivra sans Parlement. BarilIon est l’intermédiaire de ces négociations qui occupent toute l’année 1679 et qui, en cas de succès, vaudront à la favorite un présent de 5 000 pistoles et 10 000 à Sunderland. Mais Louis XIV, mécontent de la persécution anticatholique, de la convocation du Parlement, des concessions faites par Charles II à l’opposition, marchande outrageusement le monarque anglais, lui reproche ses trahisons, offre 500 000 livres par an au lieu des 3 ou 4 millions qui lui sont demandés, et n’arrivant pas à conclure d’entente sur ces bases, plus méfiant que jamais à l’égard de son inconstant allié, se remet, selon le système préconisé par BarilIon, à subventionner l’opposition pour accroître les difficultés intérieures de l’Angleterre et empêcher qu’elle puisse jamais s’unir contre lui (1679).

Très désorientée par cette politique, qui contrecarre la sienne, surprise de trouver parfois Louis XIV allié avec ses pires ennemis, la duchesse de Portsmouth sent la nécessité de se créer