la Fille aînée de l’Église, et que l’hérétique successeur de Frédéric II prenne, dans le monde catholique, la place des rois très chrétiens.
Entre tous les compétiteurs qui, au grand jour ou dans l’ombre, travaillent à nous évincer de nos droits séculaires, il en est un, il est vrai, qui ne saurait inspirer les mêmes défiances au Saint-Siège ; c’est la vieille monarchie habsbourgeoise, si longtemps l’amie de Rome, tour à tour sa protectrice hautaine ou sa docile et fidèle alliée. Mais l’antique monarchie autrichienne a vieilli ; elle n’a plus les larges ambitions d’autrefois ; si elle est loin d’avoir abdiqué toute politique impériale et toute velléité d’agrandissement, son aigle à deux têtes a senti diminuer l’envergure de ses ailes ; l’espace où il leur semble permis de se déployer s’est rétréci ; son vol le plus hardi ne saurait plus guère dépasser le Balkan et la mer Egée.
Puis, l’Autriche-Hongrie du siècle nouveau n’est plus l’ancienne monarchie apostolique des temps passés, qui faisait de l’alliance avec Rome un des points cardinaux de sa politique. La Hongrie, à demi protestante ou hétérodoxe est devenue le principal partenaire de la monarchie dualiste. Si la politique austro-hongroise continue à entourer d’égards le Souverain Pontife et ses représentans, si elle se garde de froisser inutilement la hiérarchie catholique, elle a, dans le Balkan ou sur l’Adriatique, des visées ou des intérêts qui ne concordent pas toujours avec ceux du Vatican et de la Propagande romaine. Plus d’une fois, en Croatie, en Serbie, ou lors de la convention entre le Saint-Siège et le Monténégro, la politique autrichienne, plus soucieuse du Divide ut imperes que de l’union des Eglises, s’est heurtée dans l’ombre aux efforts des évêques catholiques ou des agens de Rome[1]. Cela ne veut pas dire qu’il faille rayer la monarchie autrichienne de la liste des États qui menacent de nous supplanter et s’apprêtent à s’enrichir de nos dépouilles. Soit par elle-même comme puissance orientale, soit comme alliée de l’Allemagne, elle peut, elle aussi, arrondir sa sphère d’action à nos dépens. Jusqu’à une époque peu lointaine, elle tenait, de la tradition et du bon vouloir de Rome, sa part héréditaire, une part restreinte du protectorat catholique, dans les régions du Balkan voisines de ses États. C’est ainsi que la Bosnie-Herzégovine était,
- ↑ Voyez par exemple dans la Revue du 15 mars 1902 : l’Autriche -Hongrie en Bosnie-Herzégovine.