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Mais, c’est précisément ce qu’Auguste Comte, sous l’influence de Joseph de Maistre, et aussi de Lamennais, a parfaitement vu. On nous a reproché que, dans ces études sur « l’utilisation du positivisme, » nous ne faisions pas assez de citations du Cours de Philosophie positive ou du Système de Politique : j’en ferai donc ici quelques-unes, dont j’espère que l’on ne méconnaîtra ni l’intérêt ni surtout la portée. Tel est le passage où Comte déclare que, l’organisation ou la réorganisation d’un « pouvoir spirituel » étant à ses yeux le premier besoin des sociétés modernes, « loin de proposer à cet égard une régénération dépourvue de tous antécédens, » il s’honore au contraire de n’en pas dissimuler « la relation fondamentale avec l’admirable ébauche qui constitue le principal caractère du moyen âge, » et d’avoir lui-même, à cet effet, pour bien montrer cette relation, « rendu au catholicisme une plus complète justice qu’aucun de ses propres défendeurs, sans en excepter l’éminent de Maistre. » (Système de Politique positive, I, 86-87.) En s’exprimant ainsi, il fait allusion à la 54e leçon de son Cours de Philosophie positive, où il a tant insisté sur « le génie éminemment social du catholicisme » V, 233 ; — sur « l’admirable modification de l’organisme social » dont l’action catholique a été dans l’histoire l’infatigable ouvrière, V, 259 ; — sur la « grande destination sociale » du pouvoir catholique, V, 243 ; — sur « l’irrécusable nécessité relative, intellectuelle ou sociale, des dogmes les plus amèrement reprochés au catholicisme, » V, 269. Autant en dit-il des « institutions » du catholicisme ; et, dans les justifications qu’il donne de l’existence des ordres monastiques, V, 245-246 ; — de l’infaillibilité pontificale, V, 249-250 ; — du célibat des prêtres, V, 252-253 ; — du pouvoir temporel de la papauté, V, 255-256 ; — de la confession, V, 263-264, c’est toujours de leur fonction ou de leur utilité sociale qu’il s’autorise. La signification ou la valeur sociale du catholicisme, telle est la base de l’apologie qu’il en fait. Et, finalement, le grand grief qu’il oppose au protestantisme, c’est de n’avoir été, dès ses débuts, « qu’une protestation contre les bases intellectuelles de l’ancien ordre social', ultérieurement étendue à… toute véritable organisation quelconque, » V, 379. Au nom même du christianisme, le protestantisme s’est attaché à ruiner l’admirable système de la hiérarchie catholique, tel qu’il « en constituait socialement la réalisation fondamentale, » V, 381-382. Ce que le protestantisme a profondément altéré,