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et que M. Ribot a évoquée, lui aussi, comme un dénouement nécessaire, s’est faite naturellement et par la force des choses. Une majorité ministérielle ; qui se disloque lorsqu’il est question des plus hauts questions religieuses et scolaires, ou de la manière dont il faut entendre le patriotisme, ou des conditions d’existence de l’armée, est-elle une majorité de gouvernement ? Non, certes. Elle se dissoudrait demain s’il n’y avait pas la question des congrégations. Là est la sauvegarde de M. Combes : elle peut encore durer et le l’aire durer longtemps.


Le conflit qui s’est élevé entre le Venezuela d’une part, l’Allemagne, l’Angleterre et l’Italie de l’autre, est-il sur le point d’atteindre son terme pacifique ? Les dernières dépêches le font espérer et nous le désirerons, car, s’il se prolongeait, les puissances européennes alliées pourraient finir elles-mêmes par n’être plus tout à fait d’accord. Leurs gouvernemens ont toujours bien l’air de l’être. Les notes officieuses publiées par la presse anglaise donnent à croire qu’ils le sont. Tout le monde est décidé à maintenir le blocus jusqu’à ce que le Venezuela ait pris des engagemens suffisans, et donné surtout des garanties qu’il les tiendra. Il y a même, dans les notes anglaises, un essai, à la vérité un peu timide, de justifier les procédés particuliers par lesquels les marins allemands ont maintenu le blocus. Mais, si on se retourne du côté de l’opinion, et si on en juge par des articles de journaux qui, cette fois, ne sont pas officieux, la note change aussitôt, et on s’aperçoit que, non seulement en Angleterre, mais aux États-Unis, les esprits sont bien près de l’exaspération. En Angleterre, on regrette hautement de s’être engagé avec l’Allemagne, aux États-Unis, on se demande si on pourra longtemps encore accommoder la doctrine de Monroë avec les façons de faire des Allemands. Il faut convenir que ceux-ci ont, pour n’en rien dire de plus, la main terriblement lourde. Ils n’ont d’ailleurs pas l’air de croire que la situation soit délicate ou puisse le devenir. Ne sont-ils pas dans leur droit ? Les États-Unis n’ont-ils pas reconnu qu’ils y étaient ? L’Angleterre ne leur fait-elle pas escorte ? Dès lors, ils ne mesurent plus la portée de leurs coups, et ils s’appliquent surtout à frapper fort, comme s’ils voulaient laisser aux Vénézuéliens la même impression de terreur qu’ils ont inspirée naguère aux Chinois. C’est leur manière, il faut s’y habituer. Mais on s’en souviendra désormais avant d’engager, sur un point quelconque du globe, une nouvelle action commune avec eux.