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terrassiers contemporains de louer un coupé au mois. Pour un ouvrier parisien, qui gagnait 16 sous par jour, en 1662, 6 et même 5 sous représentaient le tiers de son salaire : quelque chose comme 2 francs pour notre compagnon de 1902, dont la journée moyenne est de 6 fr. 50 dans la capitale. Il en était de même du soldat, qui recevait alors 9 sous par jour, avec lesquels il devait se nourrir, ou du domestique nourri, dont les gages journaliers correspondaient à 5 sous.

Le carrosse à 5 sous, pour le peuple du XVIIe siècle, était bien plus cher que n’est, pour le peuple actuel, le fiacre à 1 fr. 50. Pour les « bourgeois et gens de mérite, » auxquels on réservait l’accès de ces omnibus, la somme était comparativement moins grosse, parce que le prix de la vie, en général, n’a pas du tout changé dans la même proportion que les salaires ont monté : 5 sous d’alors équivalent à 0 fr. 80 seulement. Mais ce carrosse à 0 fr. 80 la place, ne faisait qu’un trajet assez court, — deux kilomètres environ, — comparé à nos lignes d’aujourd’hui, qui parcourent pour 0 fr. 30, 15 et même 10 centimes, 5 ou 6 kilomètres.

Une seule ligne, dite du « Tour de Paris, » était de quelque importance, quoique ce ne fût pas un bien grand tour à faire que celui du Paris de Mazarin : du Marais, près la Place Royale, le carrosse se rendait à la rue Richelieu, passait la Seine au « Pont-Rouge, » à l’emplacement du futur Pont-Royal, suivait le quai, la rue des Saints-Pères, la rue Taranne (boulevard Saint-Germain), la rue Férou (près Saint-Sulpice), longeait le Luxembourg, passait devant la Sorbonne, et, par la rue Saint-Jacques, le quai de la Tournelle et l’île Notre-Dame (Saint-Louis), revenait à son point de départ, la rue Saint-Paul, au Marais.

Mais cette distance était partagée en six tronçons, avec un bureau à chaque arrêt ; qui passait plus de deux bureaux sans descendre devait, une seconde fois, payer sa place ; de sorte que cet omnibus coûtait 10 sous, — 1 fr. 60, — du Luxembourg à la rue Richelieu.


I

Au début de la Restauration, le fiacre, — en style administratif « carrosse de place », « char numéroté » en langage poétique, — restait encore sans rival et en abusait. Le prix de sa