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comme Roger-Ducos, Thibaudeau, Quinette, Sieyès ; il y avait de grands et vieux soldats comme Masséna, Lefebvre, Moncey, Mortier, La Tour-Maubourg, Durosnel. Pas un n’éleva la voix, pas un ne trouva dans son cœur de patriote un mot enflammé pour rappeler l’infortuné maréchal au devoir et à la raison. Le général de Latour-Maubourg se borna à dire que, si le rapport lu à la Chambre était reconnu inexact, il demanderait la mise en accusation de Davout. Sous la Convention, ce n’est pas le ministre de la Guerre que l’on eût décrété d’accusation pour avoir voulu ranimer les courages et élever les résolutions, c’est le chef d’armée qui par son cri de désespoir pouvait faire tomber des mains frémissantes de la France le tronçon d’épée qu’elle y tenait encore.

Vers quatre heures, on reçut par un message la résolution de la Chambre des députés. Avec leur docilité accoutumée, les pairs y donnèrent leur adhésion pure et simple. En vain Labédoyère, timidement appuyé par le comte de Ségur, objecta que l’on ne devait pas adopter une résolution équivoque : « Je demande, dit-il, que nous déclarions si c’est Napoléon II que nous proclamons, ou bien si nous voulons un nouveau gouvernement. » L’assemblée passa outre, jugeant, selon l’expression de Boissy d’Anglas, que cette proposition était « intempestive et impolitique. » En fidèle imitatrice de la Chambre des députés, la Chambre des pairs délégua son bureau à l’Elysée afin « d’exprimer à Napoléon sa reconnaissance pour la manière illustre dont il terminait une illustre vie politique. » L’Empereur ne présenta pas un front impassible à ces couronnes d’épines. Il accueillit la députation de la Chambre des pairs à peu près comme il avait reçu celle de la Chambre élective, d’un air moins sévère peut-être, mais avec non moins d’aigreur. « Je n’ai abdiqué qu’en faveur de mon fils, dit-il ; si les Chambres ne le proclamaient pas, mon abdication serait nulle... D’après la marche que l’on prend, on ramènera les Bourbons. Vous verserez