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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.

LES AFFAIRES DU VENEZUELA


31 décembre.


Il y a quelque dix ans, lorsque éclata l’un de ces scandales qui viennent périodiquement troubler et affliger notre pays, de mauvaises langues prétendaient que, dans les antichambres ministérielles et les couloirs du Parlement, on feignait d’être ailleurs et de mettre une curiosité anxieuse à se demander : « Que se passe-t-il donc à Caracas ? » Aujourd’hui encore, en des circonstances qui malheureusement ne font que trop penser à celles-là, c’est une question que l’on peut se poser d’autant plus légitimement que, cette fois, il se passe à Caracas des choses sérieuses, et même graves, où sont intéressées trois ou quatre des plus grandes puissances du monde, et desquelles, par conséquent, on ne saurait nulle part distraire son attention.

Le point de départ de toute l’affaire est naturellement une révolution. Nous disons « naturellement » parce que le Venezuela est l’un des États de l’Amérique du Sud où se vérifie le mieux cette « loi » des Républiques espagnoles d’aller d’insurrections en pronunciamientos, comme s’il fallait coûte que coûte tailler de la besogne à ces généraux improvisés et inoccupés dont on assure, en plaisantant à peine, qu’Usa sont plus nombreux que leurs soldats ; qui, en tout cas, sont presque aussi nombreux que les sous-officiers ; et qui, ne trouvant que rarement à employer leur activité ou à faire briller leurs talens au dehors, se retournent vers le dedans et, plutôt que de ne pas faire la guerre, aiment mieux déchaîner guerre civile sur guerre civile. Là, dans ces Républiques du plein soleil, entre le tropique et l’équateur, s’est exagéré