Page:Revue des Deux Mondes - 1902 - tome 9.djvu/964

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et les chefs : ils seront traités suivant les lois de la colonie, traduits devant des tribunaux ordinaires ou extraordinaires, et frappés des peines que ces tribunaux jugeront à propos de leur appliquer. Il est toutefois entendu qu’en aucun cas cette peine ne pourra être celle de mort. Ces conditions, on le voit, sont extrêmement dures : il serait d’une bonne politique de les adoucir beaucoup dans l’application, et d’en effacer un jour prochain la sévérité au moyen d’une amnistie. L’apaisement est à ce prix.

Ce traité, en même temps qu’il met fin à la guerre, clôt une phase de l’histoire de l’Angleterre. Ce n’est sûrement pas la plus glorieuse de toutes, bien qu’on ait pu y constater une fois de plus les qualités d’un peuple qui garde son sang-froid au milieu de toutes les épreuves, soutient son gouvernement, même lorsqu’il a tort, pour peu qu’il y ait un intérêt national à le faire, et dispose d’une armée réfractaire à la fatigue et au découragement. Mais plus l’Angleterre s’est montrée forte, plus les Boers se sont montrés grands. Ils l’ont été d’autant plus moralement qu’ils l’étaient moins matériellement. En succombant, comme cela était inévitable, ils ont laissé au monde, qui les ignorait presque et où leur nom est aujourd’hui glorieux, l’exemple éclatant de ce que peuvent chez un peuple le patriotisme et la foi.

Francis Charmes.
Le Directeur-Gérant,
F. Brunetière.