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attribué l’examen et la solution ; elle nomma une commission, et prescrivit que les revenus des couvens seraient intégralement versés, d’une manière qui en assurât la conservation, dans une caisse spéciale, sous la surveillance des puissances (9-14-28 mai 1864). De leur côté, les chefs des Lieux Saints déclarèrent solennellement que, dans aucun cas, leur conviction religieuse, ni la conscience de leur devoir ne leur permettraient d’admettre l’expropriation de l’Église, ni d’accepter une indemnité quelconque (22 septembre 1864).

Les protestations des puissances et des patriarches n’eurent pas plus de résultat contre les lois de sécularisation roumaines qu’elles n’en eurent en Italie et au Mexique contre des mesures de même nature prises à peu près dans le même temps. Le petit prince brava les protestations des puissances qui s’évanouirent en fumée, mais Gortchakof ne lui pardonna pas cette destruction des monastères grecs qu’il considérait comme les avant-postes de la Russie.


IV

Cette campagne avait été conduite par Couza avec l’assentiment des partis et des Chambres, dans lesquelles il n’y eut que trois voix contre la sécularisation. Il ne rencontra pas le même concours pour ses autres projets de réforme. Il ne parvint pas à obtenir le vote du code rural, ni de la loi sur l’instruction publique, et la coalition, maîtresse de l’assemblée, prononça un vote de blâme contre le ministère. Kogolnitcheno donna sa démission ; le prince ne l’accepta pas. Après une courte prorogation, il demanda par un message aux députés de voter d’urgence une loi établissant le suffrage universel, afin qu’il pût soumettre au peuple tout entier le dissentiment. La Chambre refusa de discuter le projet jusqu’à ce que satisfaction eût été donnée au vote de méfiance contre le ministère. Là-dessus, à un signe du ministre, un bataillon d’infanterie envahit la salle et expulse les députés (14 mai 1864). Le prince fait un appel au peuple. Il lui soumet un Statut et une loi électorale. Le Statut créait deux Chambres : une de députés renouvelable par tiers tous les deux ans, et un Sénat, composé de membres de droit, de membres désignés par le prince, ou par les conseils généraux, — un des meilleurs Sénats qu’on ait jamais institués. — La loi électorale