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leurs vont, en rampant, occuper les positions d’approche. Les chevaux sont amenés derrière chacune d’elles, au fur et à mesure de leur occupation. En général, ils profitent de la nuit pour s’approcher jusqu’à la portée la plus efficace du fusil, c’est-à-dire jusqu’à 400 mètres et même 300 mètres de l’adversaire. De jour, ils n’avancent que sur les points où le terrain présente des cheminemens défilés. Dans les parties découvertes, on ne met personne, de sorte que les attaques sont souvent très écartées les unes des autres. Chacune d’elles se subdivise à sa guise pour éviter les espaces battus et utiliser les couverts. Ils n’hésitent d’ailleurs pas à faire de grands détours pour éviter les zones dangereuses et aiment mieux s’entasser derrière les abris que de cheminer à découvert. Comme il est impossible d’éviter complètement les zones battues, celles-ci sont franchies par petites fractions de trois à six hommes, ou même homme par homme, au moyen de bonds très courts de 10 à 20 pas. Le feu des Anglais arrivait toujours trop tard pour s’opposer à ces bonds.

Tant que les Boers espèrent pouvoir avancer sans être vus, ils ne tirent pas. A partir de 600 à 700 mètres, lorsqu’ils sont signalés, ils appuient leur marche par un feu ininterrompu de tout petits groupes, qui, alternativement, tirent et rampent quelques pas. Moins il y a d’abris, plus on est près de l’ennemi, plus les groupes de tireurs sont réduits et plus l’amplitude de leurs mouvemens en rampant est restreinte. Les chefs ne dirigent rien. Chaque groupe avance ainsi, tant que le terrain le permet, ou reste couché quand les abris font défaut. De cette façon, les attaques se rapprochent très inégalement de l’adversaire. Dans les derniers momens, l’attaque des Boers prend donc, en terrain découvert, le caractère d’un combat de feux de pied ferme, tandis qu’en terrain couvert, les Boers arrivent en rampant jusqu’à 50 mètres de l’ennemi. Avec ces procédés, dans les circonstances où le terrain a favorisé leur marche, et quand ils ont pu attaquer de plusieurs côtés à la fois, les Boers ont eu des succès écrasans. Rampant de plus en plus près, en entretenant un tir continu et d’intensité progressive, ils obtiennent, malgré la disproportion énorme des effectifs en présence, une supériorité de plus en plus grande. Sur leur ligue de défense, les Anglais ne peuvent plus lever la tête, et les fractions en arrière sont accablées par ce feu, sans pouvoir se porter en avant.

Les fronts énormes sur lesquels les Boers mènent leurs at-