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Aussi les Anglais ont-ils dû s’en procurer à leur tour. Ils ont reçu les premiers le 26 février, la veille de la reddition du général Kronje à Paardeberg, et, depuis, ces canons font partie du matériel normal de l’artillerie.

À cette artillerie du Transvaal il faut ajouter celle de l’Etat d’Orange, comprenant 14 Krupp et quelques mitrailleuses.

Dans les plus grandes affaires, les Boers n’ont pu guère mettre en ligne que 8 à 10 pièces de ces différens modèles. Elles étaient généralement bien masquées et protégées, de sorte que, malgré une supériorité numérique écrasante, les batteries anglaises n’arrivaient que rarement à les dominer. La dispersion de cette artillerie était systématique. D’ailleurs, chaque commando tenait à avoir son canon. Les pièces se déplaçaient pour ouvrir le feu derrière un autre abri, dès que leur personnel voyait que l’adversaire avait trouvé la distance.

A peu d’exceptions près, les Boers n’ont pas employé de tranchées continues, mais bien des élémens de 10 à 20 mètres de longueur, sinueux et séparés par des intervalles de 5 à 6 mètres. Vus de haut, ils donnent l’impression de tronçons disjoints d’un long reptile. Ces morceaux de tranchées ne se ressemblent ni comme longueur ni comme organisation, ayant toutefois le caractère général de tranchées très profondes, étroites à l’ouverture, larges dans le fond. L’excavation a la forme de silo ou de jarre, les deux parois internes formant par leur obliquité un abri pour la tête contre les éclatemens des obus fusans. Les sinuosités, ainsi que la position en saillie ou en retrait des élémens les uns par rapport aux autres, empêchent le tir d’enfilade. Les coudes de certaines tranchées donnent en outre des flanquemens obliques sur la ligne générale.

Les tranchées du général Kronje à Paardeberg étaient garnies de créneaux ménagés dans l’épaisseur du parapet et formés de sacs à terre ou de feuilles de tôle ondulée qu’on trouve en quantité dans le Sud-Africain.

Outre ses armes et ses munitions, chaque tireur avait dans la tranchée les objets nécessaires à son existence : vivres, couchage, cuisine, moyens de pansement. Ces tranchées étaient sûres, mais il était difficile d’en sortir.

Souvent, à 100 ou 200 mètres en avant des tranchées, se trouvaient des réseaux de fils de fer barbelé. Les clôtures des parcs à bestiaux en fournissaient presque partout.