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qui s’applique avec succès à ramener dans le giron slave la Serbie et la Bulgarie ; c’est-à-dire que le concours de ces deux États cesse d’être acquis, pour un temps indéterminé, au progrès sur leur territoire de l’œuvre pangermanique. Le commerce allemand y conserve, sans doute, un passage ; mais l’influence allemande n’y dispose plus d’un terrain propice. La Serbie et la Bulgarie restent donc des élémens incertains, sur lesquels le germanisme n’a encore qu’une faible prise et que la patience seule sera capable de pénétrer et d’assouplir. De ce côté, la poussée orientale est provisoirement entravée vers Constantinople ; afin de gagner Salonique, elle doit réclamer le raccordement des réseaux bosniaque et ottoman entre Sérajewo et Mitrowitza.

La voie roumano-galicienne et celle du Danube sont mieux à l’abri de semblables inconvéniens. Elles se servent, en effet, de la coupure effectuée dans le slavisme par l’invasion magyare et traversent des populations que leurs aspirations politiques rattachent étroitement à l’Allemagne. Dans les bassins moyen et inférieur du Danube, aussi bien qu’en Transylvanie, Hongrois et Roumains, resserrés par l’étau slave, recherchent dans le système de l’Europe centrale la plus solide garantie de leur existence nationale. Au nord des Carpathes, les Polonais autrichiens ont jusqu’ici envisagé du même côté les conditions les meilleures dont puisse actuellement bénéficier leur race. Les circonstances présentes contribuent donc à faire du Danube et des lignes hongroises, roumaines et galiciennes vers la Mer-Noire des voies constamment ouvertes au profit du germanisme ; et, quelles que puissent être de ce côté les résistances économiques ou nationales, les peuples intéressés, plus sensibles aux intérêts communs et mieux pénétrés de la nécessité d’une entente, se montrent moins réfractaires à l’action germanique. Il en résulte que les conditions spéciales de la Hongrie et de la Roumanie les préparaient à fournir la route la mieux assurée à la nouvelle poussée orientale du germanisme, et c’est, par conséquent, chez elles qu’il devient le plus intéressant d’étudier les premiers jalonnemens de la pangermanie future.


V

La vallée du Danube a été le chemin favori des migrations de peuples. Lors des invasions barbares, toutes les races s’y