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par-dessus elle, entre l’Allemagne et les États des Balkans. Enfin, s’agit-il de déterminer le parcours des grandes voies commerciales, l’Allemagne a intérêt à soutenir le trajet le plus étendu sur son territoire par Breslau et Oderberg, tandis que l’Autriche, pour une raison inverse, préfère celui par Prague et Bodenbach, Ces multiples conflits d’intérêts provoquèrent, après le Reform-tarif allemand de 1880, une véritable lutte de tarifs, qui dura trois ans entre les chemins de fer des deux Empires ; et la rupture des relations commerciales entre l’Autriche et la Roumanie, en 1886, obligea pour un temps le transit allemand vers le Bas-Danube à se servir des lignes russes.

Ce n’est donc pas une tâche commode pour l’Allemagne que d’assurer sa pénétration parmi les intérêts contraires qu’elle rencontre en Autriche et les régimes divers qui se ramifient dans les Balkans.

Elle y est parvenue jusqu’à ce jour en accentuant partout ses prises économiques et, par conséquent, son autorité. A défaut d’une entente concrète par une réglementation commune des tarifs de douane et de chemins de fer entre les deux Empires, en vue du transit vers le Sud-Est, les circonstances ont cependant permis à l’Allemagne d’obtenir en détail de précieux résultats. La rivalité de la voie danubienne et des routes terrestres lui a valu de sérieux avantages pour l’utilisation du fleuve ; la concurrence des lignes autrichiennes et hongroises lui a facilité à bon compte l’accès du Danube par le Nordbahn et l’usage des chemins de fer de la Galicie et de la Bucowine. Elle cherche enfin à détacher peu à peu les États de la Péninsule du système autrichien pour les ramener vers le système allemand ; à se rendre maîtresse de leur législation douanière et de leurs tarifs ; et, tout au moins en ce qui concerne la Roumanie, elle a obtenu, sur ce point, un succès définitif.

Au regard de l’action politique, à laquelle sert d’instrument la diplomatie autrichienne, ainsi que de l’organisation économique et culturale, réservée à l’Allemagne, — toutes choses qui constituent, sous sa forme actuelle, la poussée orientale du germanisme, — il va sans dire que tous les États intéressés ne marquent pas la même bonne volonté ; par conséquent, les diverses routes terrestres ne fournissent pas à la pénétration allemande en Orient une égale sécurité. La voie serbo-hongroise vers Salonique et Constantinople est affectée par l’attirance de la Russie,