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REVUE LITTÉRAIRE

L’ŒUVRE DU ROMANTISME AU THÉÂTRE

Un bel enterrement est beau : il a son charme propre, fait de l’ordonnance sévère de la cérémonie, de la magnificence triste du spectacle, de l’harmonie grave de la musique, et du recueillement des assistans. A cet ordre de jouissances appartiennent celles dont nous sommes redevables à la Comédie-Française pour la solennelle reprise qu’elle a faite des Burgraves. Apparemment ce n’est pas pour nous donner la sensation de l’immortalité du génie de Victor Hugo qu’elle a choisi dans son théâtre tout juste la pièce tombée jadis de la chute la plus retentissante ; elle n’a pu songer à faire réviser par le public de 1902 l’arrêt du public de 1843, l’opinion étant établie sur une œuvre où mérites et défauts sont pareillement énormes, éclatans, aveuglans ; elle n’a pas davantage cherché une occasion de nous faire admirer la valeur d’ensemble de sa troupe, ni l’art avec lequel les chefs d’emploi de cette troupe disent les vers : c’est toujours ce qu’il y a de plus défectueux à la Comédie-Française. Mais les Burgraves marquent une date, celle de l’échec définitif du romantisme au théâtre. Ce à quoi on nous a convié, c’est donc à la pompe funèbre du drame romantique. On nous invite à méditer sur la destinée qui fut celle de ce genre depuis si longtemps défunt. Nous y serons aidés par plusieurs publications récentes. L’époque romantique est aujourd’hui fort à la mode parmi les curieux d’histoire littéraire. Après le Dumas de M. Parigot, voici un livre tout plein de renseignemens sur Vigny, son intimité, ses aventures sentimentales et ses relations littéraires, Alfred de Vigny et son temps[1], par M. Léon Séché. Puis ce sont deux volumes sur

  1. Alfred de Vigny et son temps, par M. Léon Séché, 1 vol. in-8o ; Juven.