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Il a fallu en rabattre depuis au point de vue de l’innocuité du nouveau réactif. Comme il ne sature les cheveux qu’à la suite d’une friction énergique opérée avec une brosse dure imprégnée du liquide, la peau de la tête, irritée déjà par le frottement des poils, s’enflamme encore plus au contact du caustique. Aux lésions externes qu’un tempérament eczémateux peut rendre dangereuses se joignent, d’après MM. Laborde et Meillère des accidens internes dérivant de la résorption de ce même caustique : vomissemens et affreux maux de tête. Avec des injections de force suffisante, nos deux médecins ont réussi à empoisonner des chiens.

En définitive, les teintures pour cheveux et barbe peuvent devenir une cause de danger et de danger d’autant plus grande qu’elles opèrent mieux et plus vite. Si l’on ne tient pas à risquer des maux fort graves, à compromettre sa santé, on se méfiera des prospectus des coiffeurs ou parfumeurs et on recourra au henné qui, lui du moins, est sans péril, et pour ne pas se ridiculiser en exhibant des cheveux écarlates, on se fera appliquer cette substance par un praticien exercé. Nous voilà réduits en plein XXe siècle à recommander des recettes datant de l’âge des patriarches ! il est probable qu’à cette époque primitive, beaucoup de personnes n’essuyaient point de leur tête la neige des ans et conservaient leur aspect naturel. C’est après tout ce qu’il y a encore de plus raisonnable. En ce qui concerne les femmes, nous convenons qu’une chevelure poivre et sel n’offre pas un aspect agréable ; il vaut mieux, en pareil cas, forcer l’œuvre des années et se coiffer en poudre, dont la blancheur s’ajuste à merveille avec une figure fraîche encore. Ce n’est certes pas à une dame artificiellement blonde ou brune que s’adresse le vers bien connu :

Que vous êtes charmante avec vos soixante ans !


III

Notre tâche, en ce qui concerne les origines lointaines de l’usage des cheveux postiches, sera grandement facilitée par l’abondance de documens, car les perruques eurent autrefois leur historien spécial dans la personne, non d’un coiffeur écrivain,