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fond il vaut mieux que son entourage, il a des goûts de grandeur et de domination. En d’autres temps, il eût été général d’armée, diplomate, ministre, prince de l’Église, il se serait poussé dans les charges et dans les honneurs. Aujourd’hui, toutes les carrières lui sont fermées. L’horizon lui est limité de toutes parts. Il est inhabile à toutes les besognes par où désormais un homme peut s’élever à de grandes situations. Il ne peut exercer sa domination sur les hommes ; mais il peut dominer les femmes. Il ne peut avoir des dignités ; il peut avoir des maîtresses. C’est l’unique moyen qui lui reste pour affirmer sa supériorité : il en use. Il se doit à lui-même d’en user : c’est le devoir et c’est la consigne. En s’y conformant, il n’obéit pas à une exigence de ses sens : son tempérament est médiocre ; quoique des rencontres du genre de celle qu’il a eue avec Mme de Valleroy n’aient pas dû, suivant le mot de la dame, beaucoup le « fatiguer, » il est « à la côte » avant la cinquantaine. Le plaisir n’est dans l’affaire que pour fort peu de chose : il n’aime pas ses maîtresses ; il leur joue une comédie d’amour, dont lui-même il n’est pas dupe. Est-il méchant ? Il met trop d’insistance à nous en convaincre, pour que nous ne soyons pas tentés d’en douter. Est-il sceptique ? Tout son scepticisme craque devant une ingratitude. Ni sensuel, ni roué, cet homme, qui est tout cerveau, obéit à une idée. Il est l’esclave d’une convention. Il s’est tracé un programme et s’en répète à lui-même les articles afin de se donner du courage. Il dépend de l’opinion. Il ne tient à avoir des maîtresses qu’afin qu’on sache qu’il en a : c’est sa manière à lui d’entendre l’honneur. Il n’opère que sous les yeux de la galerie ; le tête-à-tête n’a pour lui de douceurs que par-devant témoins ; il y a des compères cachés derrière la porte. Ils publieront le dernier exploit du marquis ; il en rejaillira sur lui de la considération. Il pourra demain se présenter aux gens de son monde. « Qu’est-ce qu’on en dira au cercle ? » se demande je ne sais plus quel personnage de comédie. Le marquis de Priola fait de même. C’est le Don Juan par respect humain et par théorie ; ce n’est pas seulement le Don Juan par profession, c’est le Don Juan par devoir.

Le type ainsi conçu est curieux, il est neuf, il est vrai. Comme, jadis, en écrivant Monsieur Alphonse, Dumas s’accusait d’avoir déshonoré un nom de baptême, M. Lavedan peut se vanter d’avoir dépoétisé un type littéraire. D’une main très sûre, il a écarté les vains prestiges et montré dans sa nudité, c’est-à-dire dans sa laideur, celui qu’une littérature morbide a longtemps célébré : le dilettante, l’artiste, le chercheur de sensations. Il a fait tomber le masque du héros de roman : le pleutre